Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a quitté ce vendredi la Maison-Blanche prématurément, après un affrontement verbal inédit avec Donald Trump à propos du règlement du conflit avec la Russie. Il était venu pour signer un accord sur l’exploitation des minerais dans son pays. La conférence de presse commune qui devait avoir lieu a été annulée, laissant planer des craintes sur la suite du conflit. Jeff Hawkins, ancien diplomate américain et chercheur associé à l’Iris (Institut de relations internationales et stratégiques), analyse cette séquence d’une brutalité sans précédent.
Ce clash à la Maison-Blanche est-il inédit dans l’histoire de la diplomatie ?
JEFF HAWKINS. C’est inouï. Ce n’est pas comme cela qu’on fait de la diplomatie. S’il y a des différences entre dirigeants, on ne les étale pas sous les yeux des médias. Insulter un chef d’État d’un pays qu’on a soutenu, dans l’enceinte de la Maison-Blanche, c’est une honte. On n’invite pas un « ami » pour remettre en question sa sécurité. On est en train de passer d’une diplomatie, certes intéressée, mais fondamentalement basée sur des valeurs, à une diplomatie incompréhensible. Je ne vois même pas l’intérêt pour Donald Trump dans cette séquence. Il est en train de miner la puissance des États-Unis.
Qu’est-ce qui vous surprend ?
Ce genre d’événements, entre chefs d’États, dans le Bureau ovale, est hautement chorégraphié. Les accords sont déjà généralement pratiquement signés, les discours sont préparés d’avance. La diplomatie ne s’improvise pas. Donald Trump avait obtenu ce qu’il voulait : un accès aux minerais de l’Ukraine. Mais parce que Zelensky dit qu’il veut quelques assurances pour la sécurité de son pays, le président américain l’attaque. N’importe quel chef d’État dans la même position aurait demandé la même chose. Son comportement est inexplicable.
Peut-on craindre pour la suite du conflit en Ukraine ?
La séquence marque une rupture entre les deux hommes. C’est un échec pour Volodymyr Zelensky, un échec aussi pour Donald Trump. Et ce n’est pas bon pour l’Europe non plus. C’est le moment de réagir. Les propos de Donald Trump mettent Vladimir Poutine dans une position très confortable.
La séquence peut-elle susciter un rejet dans l’opinion américaine autour Donald Trump ?
Non, parce que le peuple américain est assez mal informé sur la politique étrangère, ce n’est pas une préoccupation majeure. L’électorat MAGA, acquis à Donald Trump, va suivre son président. Une autre partie de l’électorat ne comprend pas bien les enjeux, et accepte ce qui vient de se passer. Une dernière partie, minoritaire je dirais, sera consternée par cette prise de position, mais elle était déjà anti-Trump avant.
Source le Parisien avec challengesradio.net