Avec Trump, l’offensive américaine en Afrique prendra-t-elle un nouvel élan ?

La victoire de Donald Trump à la présidentielle américaine marque le come-back du milliardaire à la tête du pays et lui donne l’occasion de reprendre les dossiers stratégiques entamés avant sa défaite en 2020. Parmi ceux-ci, l’offensive économique en Afrique où les Etats-Unis cherchent à contrer la Chine, dans un contexte international tendu.

Les félicitations pleuvent de partout. En Afrique en l’occurrence – du roi Mohammed VI du Maroc à Cyril Ramaphosa d’Afrique du Sud, en passant par Bassirou Diomaye Faye du Sénégal ou Abiy Ahmed d’Ethiopie, les chefs d’Etats saluent la réélection de Donald Trump, espérant une meilleure coopération avec le nouvel homme fort de Washington. La victoire du candidat républicain à la présidentielle du 5 novembre face à la démocrate Kamala Harris a fait l’effet d’une surprise, car elle contredit tous les sondages. Pour Donald Trump – qui obtient ainsi sa revanche après avoir échoué à se faire réélire pour un second mandat en 2020 – ce come-back lui donne l’opportunité de reprendre en main les dossiers stratégiques initiés pendant son premier mandat. Outre les questions migratoires ou financières, le nouveau Président des Etats Unis cherchait, en effet, à renforcer l’influence américaine dans le monde, en Afrique notamment.

De la réticence à l’intérêt prononcé

En 2017 pourtant, Donald Trump avait démarré son mandat en démontrant un certain désintérêt pour le continent, tardant à nommer un secrétaire d’Etat aux affaires africaines et réduisant – dans son premier budget – l’enveloppe dédiée à l’aide à l’Afrique subsaharienne. Il avait en outre créé la polémique après avoir qualifié ces pays de « pays de merde », avant d’essayer de se rattraper.

A Davos en janvier 2018, le défenseur de « l’Amérique d’abord » expliquait que cela « ne signifie pas l’Amérique seule », exprimant sa sympathie aux pays africains. Le milliardaire devenu un fin politique considère que « l’Afrique a un potentiel exceptionnel pour les affaires » et que les entreprises américaines devraient s’y rendre. Mais alors qu’il traine le pas, plusieurs experts l’interpellent quant à l’enjeu stratégique d’un renforcement de la force de frappe américaine sur le continent, surtout dans le domaine économique, face à une Chine bien avancée. Et alors que d’autres puissances comme l’Inde ou la Russie ont commencé à prendre du terrain en Afrique, Trump surprend en 2019 : il repense l’aide publicque américaine au développement, rebaptise l’agence nationale (désormais DFC), lui alloue un budget de 60 milliards de dollars et nomme à sa tête un homme d’affaires à l’agenda clairement offensif sur l’Afrique, incluant des rencontres avec différents gouvernements et l’ouverture de bureaux dans toutes les sous-régions. Si la pandémie du Covid-19 a mis un frein à cette dynamique, c’est surtout sa défaite à la présidentielle de 2020 qui l’a empêché de poursuivre ses projets africains.

Trump devra composer avec un contexte différent de celui d’il y a quatre ans

Après son investiture en janvier prochain, les experts s’attendent à voir Donald Trump pousser davantage les pions américains en Afrique, au moment où le continent se profile comme le marché du futur au sein duquel se joueront les grands enjeux géostratégiques, notamment autour des minéraux stratégiques, cruciaux pour la transition énergétique. « D’ici 2050, une personne sur quatre sur la planète sera africaine. Cette opportunité démographique et économique est attrayante pour Trump, notamment compte tenu de l’importance croissante qu’il accorde à la concurrence avec la Chine, qui fait elle aussi des percées sur le continent », analyse pour Atlantic Council, Win Weber, ancien conseiller de plusieurs campagnes républicaines. « Trump, poursuit-il, va probablement  »libérer autant que possible cette énergie de jeunesse » au cours de son second mandat en simplifiant les réglementations et en encourageant le développement des affaires et le commerce avec l’Afrique ».

En attendant, un sursaut du secteur privé américain semble en cours. Récemment JP Morgan, la première banque des Etats-Unis, faisait l’actualité avec son implantation en Côte d’Ivoire et au Kenya. En tournée dans plusieurs capitales, son PDG Jamie Dimon précisait que le groupe bancaire veut s’installer durablement sur le continent et nourrit l’ambition de concrétiser « une ou deux » nouvelles implantations ou expansions « tous les deux ans ». Si les projets de JP Morgan pourraient davantage encourager les PME américaines à regarder de plus près les marchés porteurs du continent, reste à savoir quelle forme Donald Trump donnera à sa stratégie africaine dans le contexte actuel, lequel est différent de celui de 2020, entre divers conflits dans le monde, montée du protectionnisme et défi climatique.

Ristel Tchounand

Challenges Radio

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