Blé : l’Egypte, 1er importateur mondial, blinde sa réserve stratégique

ABD0003_20170507 – ARCHIV – Ein Mähdrescher erntet am 15.08.2016 bei Pflummern (Baden-Württemberg) ein Weizenfeld ab. (zu dpa «Viele Amerikaner meiden Gluten – Studie zeigt keine Vorteile» vom 07.05.2017) Foto: Thomas Warnack/dpa +++(c) dpa – Bildfunk+++

Roumanie, France, Russie, Ukraine…, les cargaisons de blé s’enchainent dans les ports d’Egypte qui renforce sa réserve stratégique. Pris dans un double contexte de crise en Europe et de Ramadan prochain, Le Caire a également suspendu les exportations de produits de base dont les céréales.

Depuis près de deux semaines, les autorités égyptiennes réceptionnent régulièrement des cargaisons de blé en provenance d’Europe. Objectif : blinder le stock stratégique qui permettra au pays nord-africain d’approvisionner le marché national au cours des quatre prochains mois, a annoncé ce lundi le ministre égyptien de l’Approvisionnement et du Commerce intérieur, Ali el-Moselhi.

315 000 tonnes de blé roumain, français, russe et ukrainien en deux semaines

Après l’arrivage de 63 000 tonnes de blé roumain le 5 mars dernier et 63 000 tonnes de blé français le 8 mars, 189 000 tonnes de blé russe, roumain et ukrainien (à parts égales) arriveront « dans les prochains jours » dans les ports égyptiens, selon le ministre. Après cela, le pays mettra une pause aux approvisionnements extérieurs en blé, pour se rabattre sur la production nationale que le gouvernement prévoit « satisfaisante » pour couvrir les besoins « jusqu’à la fin de cette année ».

Premier importateur mondial de blé avec plus de 12 millions de tonnes par an, l’Egypte est de ces pays qui pourraient subir les effets néfastes de la guerre en Ukraine, laquelle oppose désormais la Russie (premier exportateur mondial de blé) à l’Occident. En effet, au moment où les prix des matières premières -agricoles y compris- flambent, tous les pays pensent à assurer la sécurité alimentaire sur leur sol.

Or, une pénurie de blé sur le marché égyptien serait difficilement digérée socialement, alors que le pays nord-africain -dont plus de 90% de la population est de confession musulmane- se prépare à observer le mois de Ramadan. Intervenant début avril, il s’agit d’une période de grande consommation au cours de laquelle les importations égyptiennes s’intensifient généralement.

Verrouillage des exportations d’huiles et céréales pendant trois mois

D’ailleurs outre le renforcement de son stock stratégique de blé pour consolider la sécurité alimentaire, le ministère de l’Industrie et du Commerce -dans un communiqué daté du samedi 12 mars- a suspendu pendant trois mois les exportations de toutes sortes d’huile, de gruau (blé, orge, avoine, …), maïs, haricots, lentilles, pâtes et farines. « La décision a été prise après coordination avec le ministère de l’Approvisionnement et du Commerce intérieur, dans le cadre des efforts du gouvernement pour couvrir les besoins du marché local des produits de base, en particulier à la lumière des préparatifs pour la période de forte consommation du ramadan », expliquent les équipes de la ministre Nevine Gamea.

Une dynamique positive court-circuitée

Ces orientations interviennent, soulignons-le, après une année performante pour les exportations égyptiennes qui ont globalement atteint 32,128 milliards de dollars, soit une hausse de 26,4% en glissement annuel. Sachant que les principaux clients de l’Egypte sont au Moyen-Orient (Arabie Saoudite, Koweït, Emirats arabes unis, …) et en Europe (Russie, Royaume-Uni, Allemagne…). En Afrique, le Maroc, la Tunisie, l’Algérie ou encore le Congo Brazzaville font partis des principaux clients de l’Egypte selon les documents du ministre du Commerce. Le pays se lance récemment dans une intensification de ses échanges avec le continent, en marge de la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf), pour un objectif ambitieux de 10 milliards de dollars en 2025, contre 5 milliards de dollars en 2022. La situation actuelle vient donc court-circuiter une dynamique qui augurait des perspectives optimistes pour le commerce égyptien.

Après la crise liée à la pandémie qui avait porté un coup aux chaines d’approvisionnement internationales, l’Egypte a accéléré ses efforts visant à améliorer sa productivité agricole, notamment concernant le blé, matière première pour laquelle le pays reste le premier au monde à faire recours aux fournisseurs étrangers. Avec la guerre Ukraine-Russie dont nul ne saurait pour l’instant prédire la fin, le Caire pourrait davantage appuyer sa stratégie afin de limiter au maximum sa dépendance des marchés internationaux. A suivre !

Ristel Tchounand

Challenges Radio

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