L’Europe aurait «assez de stocks pour passer l’hiver», selon Clément Beaune, le secrétaire d’État français aux Affaires européennes.
Vers 13h45, le prix du baril de Brent de la mer du Nord, la référence de l’or noir en Europe, s’envolait de 7,84% à 104,43 dollars, et le baril de West Texas Intermediate grimpait de 7,31% à 98,81 dollars. Les deux références du brut n’avaient plus connu de tels sommets depuis 2014.
Moscou a lancé jeudi à l’aube une invasion de l’Ukraine, avec frappes aériennes à travers le pays, notamment sur la capitale Kiev, et l’entrée de forces terrestres depuis le nord, l’est et le sud du pays. «Le marché prévoit un resserrement massif de l’offre» d’or noir, estime Carsten Fritsch, analyste chez Commerzbank. La Russie est l’un des premiers producteurs mondiaux de gaz et de pétrole, affolant les investisseurs quant à d’éventuelles ruptures d’approvisionnement en hydrocarbures. «En cas d’interruption partielle des livraisons de pétrole russe, les autres grands pays producteurs ne pourraient compenser que dans une mesure limitée», prévient l’analyste.
Deux jours après avoir reconnu l’indépendance de territoires séparatistes ukrainiens du Donbass, le président russe Vladimir Poutine a donné le signal des hostilités. «J’ai pris la décision d’une opération militaire spéciale», a-t-il annoncé dans une déclaration surprise à la télévision avant 6H00 du matin. «La tension bouillonnante entourant la reconnaissance par la Russie des territoires séparatistes de l’est de l’Ukraine s’est intensifiée du jour au lendemain», souligne Tamas Varga, de PVM Energy.
«À ce stade, on ne sait pas du tout ce qui pourrait ramener le président russe à la raison», abonde-t-il. «Par conséquent, les marchés boursiers et pétroliers resteront volatils.» Au moins 40 soldats et une dizaine de civils ont été tués jeudi aux premières heures de l’invasion russe de l’Ukraine, selon Kiev. L’offensive a suscité un tollé international, avec des réunions d’urgence prévues dans plusieurs pays occidentaux et notamment à l’Otan et à l’Union européenne.
Une dépendance au gaz russe
«La flambée du prix du pétrole est une terrible nouvelle pour les entreprises et les consommateurs, et fondamentalement cela clarifie l’un des principaux impacts de la guerre entre la Russie et l’Ukraine» sur l’économie mondiale: «elle servira à alimenter davantage l’inflation», affirme Russ Mould, analyste chez AJ Bell. «Les factures d’énergie continueront d’augmenter», poursuit-il.
La Russie est également le premier exportateur mondial de gaz naturel. Le Vieux Continent importe environ 40% de ses besoins depuis la Russie. Il n’existe pas de solution immédiate pour remplacer sur le marché du gaz européen les importations venues de Russie, si celles-ci devaient cesser, a averti jeudi le géant français de l’énergie Total Energies. «Si le gaz russe ne vient pas en Europe, on a un vrai sujet de prix du gaz en Europe», a déclaré le président du groupe Patrick Pouyanné, mettant l’accent sur la dépendance européenne au gaz russe.
Le secrétaire d’État français aux Affaires européennes Clément Beaune avait quant à lui assuré mercredi que l’Europe avait «assez de stocks pour passer l’hiver». À la suite de la reconnaissance de provinces ukrainiennes prorusses, l’Allemagne avait fini par se résoudre mardi à suspendre la certification du gazoduc Nord Stream 2, un projet phare pour Berlin comme pour Vladimir Poutine mené depuis longtemps malgré les critiques.
Un haut responsable américain a vu dans l’annonce de Berlin un «tournant majeur» qui «libérera l’Europe de l’étau géostratégique russe» lié à l’approvisionnement en gaz naturel. Le marché de référence en Europe, le TTF (Title Transfer Facility) néerlandais repartait à la hausse, à 129,00 euros le mégawattheure (MWh). Le prix du gaz naturel s’est ainsi envolé de 40%, la plus importante hausse en une journée depuis 2019.
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