La Banque d’Angleterre a indiqué que la flambée des prix de l’énergie suite à l’invasion de l’Ukraine par la Russie commence à avoir des effets visibles sur l’économie britannique. Les études sur les entreprises et la consommation réalisées par l’institution monétaire commencent à montrer un ralentissement de la croissance et de la demande. L’inflation, elle, reste toujours très élevée.
La guerre russe en Ukraine commence à impacter le Royaume-Uni. Selon le gouverneur de la Banque d’Angleterre (BoE), Andrew Bailey, le conflit entraîne « un choc historique pour les revenus réels ». Lors d’une conférence de l’institut Bruegel ce lundi 28 mars, ce dernier a souligné que la hausse des prix de l’énergie avait atteint un niveau qui n’avait jamais été observée au cours des années 1970, pourtant marquées par un choc pétrolier qui avait provoqué une inflation sur plusieurs années.
« Nous nous attendons à voir la croissance et la demande ralentir, et nous commençons à l’observer dans nos études sur les entreprises et la consommation », a indiqué le gouverneur de la BoE.
Les ménages les moins aisés, ceux qui n’ont pas pu réaliser d’économies pendant la pandémie et qui dépensent une plus grande partie de leur revenu pour se chauffer et se déplacer, seront les premiers touchés, a souligné Andrew Bailey.
Cette triste prévision intervient après une année 2021 très dynamique pour le Royaume-Uni, qui avait enregistré l’an dernier une croissance de son PIB record de 7,5%, après une contraction de 9,4% constatée en 2020. Avant même le début de la guerre en Ukraine, la BoE et des économistes anticipaient une croissance autour de 3,75%. Certains alertaient même déjà sur le fait que l’inflation et la hausse des impôts contraindrait la croissance.
Durcissement de la politique monétaire pour faire face à l’inflation
Pour toutes les banques centrales, la guerre en Ukraine représente un nouveau dilemme : la perturbation du marché de l’énergie et d’autres matières premières (blé, aluminium…) fait grimper les prix, aggravant une inflation déjà forte avant le conflit. Au Royaume-Uni, l’inflation a atteint 5,5% en janvier et même 6,2% en février, des niveaux largement au-dessus des 2% espérés initialement par la BoE. Elle devrait d’ailleurs encore augmenter selon les prévisions de l’institut monétaire.
Pour tenter de contrer cette inflation galopante, les banquiers centraux doivent choisir entre garder des politiques monétaires ultra-accommodantes, au risque de voir l’inflation s’installer durablement, ou remonter leurs taux, ce qui pèse sur la capacité d’emprunts et sur les crédits des particuliers comme des entreprises.
La BoE a fait le choix de relever ses taux à trois reprises depuis fin 2021. La dernière fois en date était le 17 mars avec une hausse de son taux d’intérêt de 0,25 point de pourcentage, à 0,75%. Elle a justifié sa décision par « les tensions sur le marché du travail, les signes continus de coûts et pressions inflationnistes, et le risque qu’elles persistent ».
La BoE a également prévenu qu’il est « probable » que la guerre en Ukraine « exacerbe les perturbations de chaînes d’approvisionnement ». « Les pressions inflationnistes vont donc se renforcer considérablement dans les prochains mois, tandis que la croissance dans les pays importateurs nets d’énergie comme le Royaume-Uni devrait ralentir », avertit la BoE.
La BoE a reconnu que, si un « resserrement supplémentaire modeste de la politique monétaire serait probablement nécessaire dans les prochains mois », « des risques existent des deux côtés de ce jugement ». Le patron de la BoE a assumé ce lundi 28 mars de refléter l’incertitude qui plane sur le marché, et assure ne pas avoir pris de décision sur une possible quatrième hausse des taux en mai. « Tout ce dont je suis sûr, c’est qu’il y aura une réunion en mai », a-t-il plaisanté.
Pic attendu en octobre
« L’inflation va encore augmenter dans les prochains mois, aux alentours de 8% au deuxième trimestre 2022, et peut-être encore plus haut plus tard dans l’année », prévient la BoE. Elle avait prévu que l’inflation culmine en avril à 7,25% en raison de la hausse des cours du gaz et du pétrole, qui va pousser le régulateur britannique du marché de l’énergie à augmenter le prix régulé de l’électricité. Mais le conflit en Ukraine ayant fait flamber le coût des hydrocarbures, le plafond de tarifs de l’électricité pourrait encore augmenter au Royaume-Uni lors de la prochaine révision, en octobre.
La BoE n’exclut plus une inflation en fin de cette année de « plusieurs points de pourcentage au-dessus de ce qui était attendu ». Si « à plus long terme, l’inflation devrait ralentir de façon marquée », note la BoE, c’est en vertu d’un scénario peu réjouissant : le coût de l’électricité sur le pouvoir d’achat devrait détruire une partie de la demande.
ZOOM : LONDRES PRÊTE À RETIRER SES SANCTIONS EN RUSSIE SOUS CERTAINES CONDITIONS
Alors que le Royaume-Uni a pris des sanctions contre plus de 1.000 individus et entreprises russes ou biélorusses au cours des dernières semaines, celles-ci pourraient être levées si le Kremlin s’engageait à respecter un cessez-le-feu total, retirait ses troupes d’Ukraine et s’engageait à ne plus commettre d’agression contre l’Ukraine, a déclaré la ministre britannique des Affaires étrangères, Liz Truss, dans une interview accordée samedi 26 mars au Sunday Telegraph.
Ces déclarations font écho à celles du secrétaire d’État américain Antony Blinken indiquant que les sanctions contre la Russie « n’ont pas été conçues pour être permanentes » et qu’elles pouvaient disparaître si Moscou changeait d’attitude.
La ministre britannique a également indiqué avoir mis sur pied une unité spécialisée dans les négociations au sein de son ministère pour assister l’Ukraine dans ses pourparlers avec la Russie. Elle a toutefois averti qu’elle ne pourrait être utile qu’une fois que les « Russes seront sérieux » dans leur volonté de négocier. « Je ne crois pas qu’ils soient sérieux maintenant et c’est pourquoi j’ai dit qu’il fallait se montrer dur pour obtenir la paix », a-t-elle ajouté. Il est donc nécessaire de « doubler les sanctions » et « doubler les armes que nous envoyons à l’Ukraine », a-t-elle assuré.
Source TA