Par Rodrigue Fenelon Masala, grand reporter.
Depuis dimanche, sa silhouette athlétique est à la une de tous les médias guinéens. Béret rouge vissé sur le crâne, lunettes de soleil barrant le visage, Mamady Doumbouya est apparu au commun des guinéens en prononçant à la mi-journée un requisitoire contre un pouvoir qu’il estime autocratique. L’homme qui a «capturé»Alpha Condé, mettant fin à 11 ans de pouvoir, a bien choisi son angle de tir.
Le président guinéen revenait à peine de ses vacances en Sardaigne (Italie) dans une île paradisiaque. Son tombeur le guettait. Car Mamady Doumbouya le savait, son arrestation était une question de jours. Depuis début août, il avait été gardé au secret par le ministre de la Défense Mamadi Diané (celui là même qui essaie aujourd’hui d’organiser la riposte, sans succès pour le moment).
Replié dans son QG, le haut officier a organisé l’opération de bout en bout. Ses hommes l’ont libéré dans la nuit de samedi à dimanche et le matin, il est entré en action.
Si le président Condé est bel et bien entre les mains de son commando, Mamady Doumbouya le sait, il lui reste encore à convaincre les hauts gradés de l’armée guinéenne et, aussi, une communauté internationale qui condamne, comme l’a répété l’Union Africaine dans son communiqué sur la situation en Guinée, «toute prise de pouvoir par la force».
Pour l’heure, le commandant des forces spéciales assure contrôler le palais présidentiel et les sites névralgiques de Conakry. Il a aussi annoncé le ralliement de certaines unités de l’intérieur du pays. Selon une source proche de l’état major guinéen, il y a des négociations entre les putschistes et les différentes unités de l’armée.
Les premières déclarations du colonel Doumbouya vont-elles avoir l’effet de débloquer la situation? En tout cas si l’armée tarde à rallier dans son ensemble, la rue guinéenne semble, elle, avoir approuvé le coup de force.
En attendant, les guinéens cherchent à en savoir un peu plus sur leur nouvel homme fort. Son parcours dénote d’un officier aguerri. Originaire de la région de Kankan, le Colonel et commandant du Groupement des forces spéciales de l’armée guinéenne est officier breveté de l’Ecole de guerre. À son compte, plus de quinze années d’expérience militaire, notamment lors de missions opérationnelles (Afghanistan, Côte d’Ivoire, Djibouti, République Centrafricaine) et de protection rapprochée (Israël, Chypre, Royaume-Uni, Guinée).
Le commandant Mamady Doumbouya a brillamment accompli la formation de spécialiste en protection opérationnelle à l’Académie de Sécurité Internationale (Israël), le cours de formation des commandants d’unité à l’Ecole d’application de l’infanterie (E.A.I. – Sénégal), la formation d’officier d’Etat-major (EEML Libreville) et l’Ecole de guerre de Paris », nous précise une de nos sources.
Ancien légionnaire de l’armée Française, le meneur des putschistes avait été rappelé à Conakry en 2018 par le président Alpha Condé qui lui confiera la direction du corps d’élite des forces spéciales anti-terroristes. Une force hyper équipée disposant d’éléments aguerris pour les opérations spéciales.
Notons que le Président en exercice de l’Union africaine, Félix Tshisekedi, et le Président de la commission de l’Union africaine, Moussa Faki Mahamat, condamnent toute prise de pouvoir par la force et demandent la libération immédiate du Président Alpha Conde.
Ils invitent le Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union africaine à se réunir d’urgence pour examiner la nouvelle situation en Guinée et pour prendre les mesures appropriées aux circonstances.