Inflation : Bercy maintient la pression sur les distributeurs

Faire baisser les prix dans les rayons des supermarchés. C’est bien là l’objectif affiché du gouvernement. Et pour cause, alors que l’inflation générale en France atteignait 5,9% sur un an en avril, la hausse des prix de l’alimentaire se situe, elle, à un niveau bien plus élevé, proche de 15%.

Elle aurait d’ailleurs contribué « à hauteur de 40% » à l’inflation générale, alors qu’elle ne représente « que » 16% du panier moyen de consommation des ménages, d’après l’Insee. D’ici au mois de juin, « les prix à la consommation des produits alimentaires conserveraient un rythme de progression soutenu (entre 15 et 16% sur un an) », a estimé l’institut de Statistiques. a annoncé la tenue d’une nouvelle réunion en présence des géants de la grande distribution jeudi. L’objectif : les pousser à rouvrir les négociations commerciales pour faire baisser les prix de l’inflation des produits alimentaires qui atteignait encore 15% sur un an en avril. Mais les industriels comme la grande distribution se montrent prudents quant à cette solution.

Pour tenter d’inverser la tendance, l’exécutif se tourne donc vers les géants de la grande distribution dans l’espoir de les convaincre de consentir à un geste envers le consommateur.

Prolongement du « trimestre anti-inflation »

Une requête que Bruno Le Maire devrait à nouveau formuler jeudi lors d’une réunion à Bercy avec les poids lourds du secteur. Ce rendez-vous ne réunira que les distributeurs, a précisé le ministère de l’Economie, ce vendredi, confirmant une information de BFM Business. Une seconde réunion avec les industriels est prévue « dans un second temps », à une date qui reste à définir selon Bercy.

Plus tôt dans la semaine, Bruno Le Maire a annoncé le prolongement au-delà du 15 juin du « trimestre anti-inflation » qui laisse aux enseignes de la grande distribution le choix d’une sélection de produits sur lesquels elles s’engagent à proposer « le prix le plus bas possible » en rognant sur leurs marges. « Nous voulons avec les distributeurs prolonger l’opération pour que les distributeurs continuent de s’engager sur la baisse d’un certain nombre de prix », a ainsi expliqué le ministre de l’Economie. Mais ça n’est pas suffisant et le gouvernement réfléchit désormais à de nouveaux moyens d’amortir le choc de l’inflation alimentaire au-delà du premier semestre.

Réouverture des négociations commerciales

L’une des solutions envisagées est une réouverture des négociations commerciales entre industriels et distributeurs et celle privilégiée par l’exécutif. Rendez-vous annuel destiné à fixer les conditions tarifaires dans lesquelles les distributeurs achètent à leurs fournisseurs les produits qu’ils proposent en supermarché, les dernières négociations commerciales se sont achevées au 1er mars et ont abouti à une hausse moyenne d’environ 10% des prix payés par les supermarchés à leurs fournisseurs industriels.

Dimanche dernier, la ministre déléguée au Commerce, Olivia Grégoire, a ainsi promis que leur réouverture devrait mener à « une baisse visible des prix » alimentaires à la rentrée. « Les fruits de ces négociations vont porter à l’été, et je peux, avec une certaine certitude, vous assurer qu’à la rentrée nous aurons une baisse visible des prix dans les rayons » alimentaires, a-t-elle assuré dans l’émission « Questions politiques » diffusée sur France Inter, Franceinfo et Le Monde.

Quelques jours plus tôt, Elisabeth Borne avait déjà exhorté les industriels à « répercuter » la baisse de leurs coûts de production pour que cela se traduise par « des baisses concrètes, tangibles » des prix bien avant la rentrée : « d’ici la fin du mois de juin », avait-elle dit.

Bruno Le Maire va donc réitérer cette injonction jeudi prochain. D’autant que l’on observe une baisse, depuis quelques mois, du coût de certaines matières premières, sans que cela se traduise nécessairement dans les prix en supermarché. Face à la hausse des prix alimentaires, « l’Etat a pris sa part, les distributeurs également, les consommateurs la prennent au quotidien », a souligné ce vendredi Olivia Grégoire lors d’un débat à l’Assemblée nationale.

« Nous attendons désormais que les industriels prennent la leur » en rouvrant des négociations commerciales afin de baisser les prix, a-t-elle insisté. S’ils ne s’exécutent pas, la ministre menace de « citer nommément dans le débat public » les acteurs récalcitrants, voire à les sanctionner via des « mesures fiscales ».

Industriels et distributeurs avancent des freins à la réouverture des négociations

De leurs côtés, les industriels se sont montrés ouverts à l’éventualité, mais prudents quant à cette solution. Ils « feront leur part », a ainsi assuré à l’AFP Jean-Philippe André, président de leur principale organisation, l’Association nationale des industries alimentaires. Il a toutefois exclu une renégociation « généralisée ». « Il ne peut pas y avoir des renégociations sur tous les produits », a-t-il insisté, expliquant que, pour certains produits, les cours des matières premières nécessaires à leur fabrication n’ayant pas baissé sur les marchés mondiaux, une renégociation des prix de vente à la baisse n’était pas envisageable.

Il a également souligné que certains contrats sur les achats de blé ou de gaz souscrits par les industriels courent sur plusieurs mois, voire une année, avec des tarifs fixés à la signature. « Tant que l’on n’arrive pas à l’échéance, on ne peut pas répercuter la baisse », a-t-il fait valoir.

De même, l’Ilec, organisation patronale représentant les industriels produisant des grandes marques nationales (Coca-Cola, Danone, L’Oréal ou Nestlé par exemple) a affirmé, dans un courrier adressé au ministre de l’Economie que « chaque entreprise dont la santé et les perspectives financières le permettront saisira toute opportunité de restituer du pouvoir d’achat à ses consommateurs ». Néanmoins, les renégociations de prix devront se faire dans le cadre des clauses de révision prévues par les contrats déjà signées, a-t-elle averti.  Or, « il y a plein de contrats qui ne comportent pas de clauses de renégociations parce que nous n’avons pas réussi à nous mettre d’accord » sur leurs modalités, a affirmé le PDG de Système U Dominique Schelcher.

(Avec AFP)

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