Dans de nombreux pays d’Afrique de l’Ouest, l’agriculture demeure l’un des principaux moteurs économiques, assurant la subsistance de millions de personnes et constituant le principal pourvoyeur d’emplois tant et si bien que l’on estime à 1.000 milliards de dollars en 2030 le secteur agroalimentaire africain .
Cependant, malgré son importance, ce secteur est confronté à des défis considérables qui entravent son potentiel de contribuer de manière significative au développement socio-économique de la région. Cette dépendance peut également devenir un obstacle lorsque les agriculteurs sont confrontés à des défis tels que des rendements variables et des vulnérabilités économiques. Par Serge-Auguste Kouakou, directeur UEMOA de la Fondation Mastercard.
Les petites exploitations représentent 70% de la nourriture produite en Afrique[1]. L’agriculture de subsistance prédomine, avec de nombreuses exploitations de petite taille limitées dans leur capacité à adopter des pratiques modernes et à accéder aux marchés. Ce constat, couplé à une faible mécanisation, un sous-financement structurel des exploitations familiales, et des chiffres démontrant que l’Afrique a les moyens d’assurer son autosuffisance alimentaire sous certaines conditions, met en évidence la nécessité d’une transformation significative.
Libérer le potentiel des jeunes agriculteurs africains et stimuler le développement
L’agriculture, souvent sous-estimée, représente un source majeure d’opportunités pour l’emploi des jeunes en Afrique. Ce secteur est notamment poussé au développement par les politiques locales, comme en témoigne la Politique Agricole de l’UEMOA (PAU) adoptée en 2001. L’objectif étant de rendre compétitives les différentes exploitations des cultures variées de la zone, créant ainsi des opportunités d’investissements et d’emploi. Un changement de perception et la dissipation des préjugés sur le secteur agroalimentaire peuvent libérer le potentiel sous-exploité des productions, stimuler la croissance économique, encourager l’innovation, et créer des emplois durables.
Bien que l’emploi agricole soit souvent caractérisé par son caractère informel, des opportunités d’amélioration se dessinent pour garantir aux travailleurs des conditions stables, des protections sociales adéquates et des salaires décents. Des initiatives de développement agricole ont été lancées pour relever ces défis. Cependant, malgré les efforts évidents, il reste encore à renforcer les mécanismes législatifs et financiers mis en place par les États, ainsi que l’aide internationale, afin de favoriser une amélioration significative dans ce secteur vital.
Secteur privé en action
Le secteur privé peut jouer un rôle central dans la transformation du secteur agricole, des synergies vertueuses peuvent être établies, avec des mécanismes de financement innovants pour soutenir la numérisation et la mécanisation des exploitations. En collaborant avec les agriculteurs, le secteur privé peut contribuer à stimuler l’innovation, renforcer les capacités techniques et créer des emplois stables.
Parmi les meilleures solutions, le « Fork to Farm » apparaît comme une opportunité stratégique, en partant de la demande du consommateur. Cette approche vise à transformer l’agriculture en une source d’emplois attractifs pour les jeunes en Afrique et ainsi permettre à 6,2 millions de jeunes de la zone UEMOA, dont 70% de femmes, d’accéder à un travail digne et valorisant d’ici à 2030. Le secteur privé a les capacités d’établir un système agroalimentaire durable grâce à l’éducation, la formation technique, et la création d’écosystèmes entrepreneuriaux pour changer les perceptions et doter les jeunes des compétences nécessaires. Soutenus, les agro-entrepreneurs sont encouragés à adopter des pratiques durables et à peuvent accéder à des financements, alors qu’ils étaient jusqu’ici, exclus des mécanismes de financement classiques.
Il est impératif que le secteur privé adopte, en collaboration avec les acteurs publics, gouvernementaux et supranationaux, un nouveau prisme pour contribuer de manière plus active au développement socio-économique de l’Afrique de l’Ouest. En mettant l’accent sur une approche locale, le secteur privé peut favoriser l’enrichissement de toute la société, contribuant ainsi à un avenir plus prospère pour la région.
Avec des solutions novatrices et un engagement accru du secteur privé, le développement agricole en Afrique de l’Ouest peut se transformer en un moteur puissant de progrès et de prospérité pour ses habitants. L’heure est venue de passer à l’action et de concrétiser le potentiel inexploité du secteur agricole dans la région.
« Le temps est venu de transformer l’agriculture africaine. Voici pourquoi en cinq chiffres », FIDA, 05 septembre 2024