L’agribusiness doit être au cœur de la relation entre l’Europe et l’Afrique orientale et australe

En Afrique orientale et australe, le secteur agroalimentaire a montré une solide résilience face à la crise liée à la Covid-19, de la production a la distribution. L’épisode pandémique a néanmoins mis en lumière l’importance cruciale de la souveraineté alimentaire pour cette région qui connaît une croissance démographique forte et continue. Pour atteindre cet objectif de souveraineté, les acteurs agroalimentaires de cette partie du continent ont besoin de financements, que peuvent leur fournir les entreprises européennes : des investissements qui promettent d’être aussi rentables que durables.

Plusieurs facteurs peuvent expliquer la résilience admirable du marché agroalimentaire de cette région face à la crise de la Covid-19 : de fortes précipitations, qui ont permis d’obtenir des récoltes de qualité à la fin de l’année 2019 et confirmées en 2020, des saisons de plantation entamées largement avant l’explosion de la crise sanitaire, mais aussi l’importance nouvelle accordée aux enjeux de souveraineté alimentaire. En effet, la pandémie a incité plusieurs pays de la région à placer l’agriculture – et les activités connexes – au centre de leurs priorités, se focalisant ainsi sur la préservation de la chaîne de valeur de ce secteur stratégique.

Cette priorité donnée à la protection du secteur agroalimentaire est fondamentale : les prévisions du FMI indiquent que d’ici 2050, l’Afrique abritera une population de plus 2 milliards d’individus. Face à la croissance démographique exponentielle que connait le continent, les défis sont de taille : les importations alimentaires, recours massivement utilisé en raison du déficit de produits finis et manufacturés localement, doivent laisser place à l’investissement. En effet, l’ouverture du capital des entreprises agroalimentaires apparaît comme étant la meilleure solution pour les faire croître, et assurer ainsi la souveraineté alimentaire de la région. Cependant, si l’investissement financier est nécessaire, les acteurs de l’agroalimentaire d’Afrique orientale et australe sont également enclins à accueillir au sein de leur capital des partenaires stratégiques, aptes à les aider à effectuer des  »sauts technologiques ».

De l’autre côté de la Méditerranée, l’Europe – et plus particulièrement la France – dispose d’un secteur agroalimentaire coopératif et privé désireux de se développer sur le continent africain. Ces groupes ont, en plus de leur force de frappe financière, les moyens d’apporter aux entreprises de la région une expertise technique, marketing et commerciale, dépassant ainsi le statut de simple fournisseur.

L’Afrique orientale et australe offre des possibilités d’expansion significatives : premièrement, la région connait depuis plusieurs années une transformation digitale d’ampleur, illustrée par l’utilisation croissante de technologies numériques de pointe (systèmes d’irrigation solaire, reconnaissance d’images pour aider à diagnostiquer les maladies des cultures, etc.). De plus, la zone de libre-échange continentale africaine (AfCFTA),qui devait entrer en vigueur en mai 2019, reliera bientôt 1,3 milliard de personnes, créant ainsi un bloc économique de 3400 milliards de dollars. Enfin, le potentiel de la région est d’autant plus considérable que ces indicateurs financiers encourageants peuvent se conjuguer à des objectifs de développement durable réels.

Les investissements de groupes européens dans le marché de l’agroalimentaire régional peuvent augmenter le volume de produits régionaux et internationaux de manière significative et durable. Par exemple, ces apports financiers peuvent s’engager à favoriser la production et la vente de produits destinés aux marchés locaux et régionaux, sans oublier d’améliorer les pratiques commerciales en privilégiant les productions ayant un impact environnemental positif. Ces financements doivent par ailleurs favoriser l’emploi local équitablement réparti entre les hommes, les femmes et les jeunes disponibles sur le marché du travail, tout en se focalisant sur les entreprises sensibles à leur empreinte écologique. Marché porteur et à la croisée du rentable et du durable, l’Europe et l’Afrique orientale et australe gagneraient à mettre l’agribusiness au cœur de leurs relations.

 

(*) Henri de Villeneuve est fondateur et directeur de COBASA, une société de conseil spécialisée dans les investissements et le montage de projets en Afrique orientale et australe, basée à Johannesburg, et de SAPA, un véhicule d’investissement dans des sociétés locales présentes dans l’ensemble de la chaîne de valeur agroalimentaire.

Par Henri de Villeneuve

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