“A ceux qui critiquent les imperfections de notre démocratie, je répond que nous n’avons mis que quelque décennies pour la mettre en place. Les grands pays démocratiques, de leur côté, n’y sont parvenus qu’au terme de plusieurs siècles marqués par des révolutions, des guerres civiles et même des épisodes de dictature”, martèle le président camerounais Paul Biya lors de son discours de nouvel an consacré à la lutte contre la pandémie Covid-19, à la situation sécuritaire dans le Nord du pays, à la crise anglophone, aux réformes portant, entre autres, sur la décentralisation et à la relance économique.
“En démocratie, l’accès aux responsabilités politiques est assuré par la voie des urnes et non par la rue, par certains médias ou par les réseaux sociaux”, assure le président Biya dans une pique à l’opposant Maurice Kamto dont la marche pacifique, assimilée à une insurrection, a abouti à une assignation à résidence entre le 21 septembre et le 9 décembre 2020. Le président camerounais rappelant, pour illustrer son propos, que le pays respecte toutes les échéances prévues par son texte fondamental. Ainsi, en mars 2018, le mandat des sénateurs a été renouvelé. En octobre de la même année, le chef de l’Etat a été réélu avec une très large majorité, en février 2020, les élections législatives ont lieu, assurant au gouvernement une majorité confortable à l’assemblée nationale. A la même date, les élections municipales mettent fin au système de délégués du gouvernement dans les grandes villes désormais gérées par des maires élus. En décembre 2020, les élections régionales viennent de compléter les dispositions prévues dans le système de décentralisation.
“Ainsi, poursuit Paul Biya, se confirme chaque jour davantage notre volonté de mener à bien le projet démocratique répondant aux souhaits véritables du peuple camerounais”. Un projet démocratique dont le départ remonte, selon le président camerounais, à son accession à la magistrature suprême (en 1984) suivie quelques années plus tard par l’institution du multipartisme. “Je suis bien conscient de tout ce qui reste à faire mais j’ai la conviction que nous sommes sur la bonne voie et nous serons bientôt fiers de nos avancées démocratiques”.
En 2020, l’armée camerounaise a dû faire face à plusieurs raids isolés de Boko Haram et aux attaques “des bandits de grand chemin “dans sa région Nord. “La situation est différente dans nos régions du Nord Ouest et du Sud-Ouest où des groupes armés entretiennent un climat de terreur et d’insécurité. C’est ainsi que périodiquement, ils attaquent des communautés isolées et des écoles”, déplore le président Biya rappelant le récent “crime odieux à Kumba qui a vu la mort de 7 écoliers. “Tous les coupables seront recherchés sans relâche et traduits devant la justice”, a promis Paul Biya en comparant les “soit-disants sécessionnistes” à des “assassins d’enfants innocents”.
Et d’appeler à leurs responsabilités les “pays amis” qui hébergent les commanditaires et les organisations qui les financent”, sans désigner nommément lesdits pays et organisations. “Tous ceux qui au terme de l’enquête seront identifiés comme commanditaires ou donneurs d’ordres seront traduits devant la justice”, déclare Paul Biya, rappelant la main tendue du pouvoir et les réformes en vue d’apaiser la situation. Parmi ces réformes, à noter la mise en oeuvre d’une politique de décentralisation donnant un statut spécial aux régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest.
Erosion de la croissance économique du Cameroun en 2020
Sur le plan économique, le Cameroun a été impacté par la pandémie Covid-19. Entre mesures de consolidation budgétaire et soutien à l’économie, le pays a décidé de finaliser les projets qui concernent le Championnat d’Afrique des Nations en 2021, les travaux de la Coupe d’Afrique des Nations de 2022 et de poursuivre la mise en oeuvre des plans de reconstruction et de développement des régions du Nord Ouest, du Sud-Ouest et de l’extrême Nord.
Malgré ces efforts, déplore Paul Biya, il est prévisible que notre taux de croissance qui s’était stabilisé autour de 4% ces dernières années subisse une nette érosion en 2020 et que l’inflation reparte en hausse”. Le président imputant cette érosion au ralentissement de la croissance mondiale et à l’augmentation des dépenses de sécurité. Néanmoins, il apparaît qu’en dépit des difficultés, l’économie camerounaise a conservé une certaine capacité de rebond, le président espérant une possible reprise dans les mois à venir.
Par Albert Savana
Le cadre macroéconomique du Cameroun a évolué avec le lancement récent de la Stratégie nationale de développement (SND) qui remplace le Document de stratégie pour la croissance et l’emploi (DSCE) arrivé à son terme. Le SND définit les grands axes de la planification jusqu’en 2030 en portant sur la transformation structurelle, le développement inclusif, l’emploi des jeunes et des femmes. A terme, le Cameroun compte atteindre un taux de croissance de 8% par an en accélérant la transformation structurelle de son économie pour une émergence fixée à l’horizon 2035. “Nous pourrons atteindre nos objectifs à condition de faire les efforts nécessaires”, estime le président Biya revenant sur les défis d’une année 2020 difficile et les perspectives d’une année 2021 devant être celle de la reprise.
Par Albert Savana