OMC : l’administration Biden penchera-t-elle pour Ngozi Okonjo-Iweala ?

Aux Etats-Unis, les appels se multiplient pour que le nouveau président Joe Biden et son administration choisisse la Nigériane Ngozi Okonjo-Iweala –dont la double nationalité américaine est mise en avant- pour la direction générale de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), désignation bloquée par l’administration Trump en octobre 2020. Si l’impatience gagne les rangs de l’OMC, certaines voix, y compris en Afrique, expriment plutôt un certain optimisme.

A Genève, qui abrite le siège de l’Organisation mondiale du Commerce (OMC), on veut sortir de l’impasse et désigner enfin la nouvelle directrice générale. Poste pour lequel la Nigeriane Ngozi Okonjo-Iweala est sortie favorite face à la Coréenne Yoo Myung-hee, avant le blocus de l’administration Trump en octobre 2020. Le sujet était à l’ordre du jour ce vendredi 29 janvier lors d’une réunion ministérielle informelle de l’OMC tenue virtuellement et réunissant 29 ministres du Commerce et hauts fonctionnaires, dont des Américains. « Les ministres ont souligné l’urgence de la nomination rapide d’un nouveau directeur général de l’OMC », déclare Guy Parmelin, Président de la Confédération suisse, dans un compte rendu personnel consulté par LTA.

Alors que Ngozi Okonjo-Iweala avait en effet obtenu le soutien de l’écrasante majorité des membres de l’OMC et était déjà célébrée par certains Africains comme la nouvelle patronne du commerce mondiale, la préférence de l’administration Trump pour la candidate sud-coréenne coïncidant avec l’élection présidentielle américaine et la défaite de l’ancien locataire de la Maison Blanche avait interrompu le processus. Robert Lighthizer, alors représentant au Commerce des Etats-Unis avançait comme motif « la faible expérience commerciale » de la Nigériane. Depuis que Joe Biden a été confirmé dans ses fonctions, le dossier OMC apparait comme l’un des plus urgents de son administration.

Si le tweet de Karen Bass, membre du parti républicain et du congrès américain, a particulièrement attiré l’attention mercredi dernier, elle n’est pas la seule à appeler le nouveau président américain et son administration à donner leur voix à Ngozi Okonjo-Iweala pour son élection à la direction générale de l’OMC.

Candidate africaine ou américaine ?

Quelques jours plus tôt, 37 anciens hauts fonctionnaires du gouvernement américain et dirigeants du monde universitaire, de la société civile et du secteur privé ont publié une lettre ouverte adressée à Joe Biden l’appelant à « soutenir » l’élection de l’ex-ministre nigériane des Finances.

A l’instar de plusieurs hauts fonctionnaires internationaux, Ngozi Okonjo-Iweala dispose de la double nationalité nigériane et américaine. Elle qui travaille et vit aux Etats-Unis depuis plusieurs décennies. Et c’est cette nationalité américaine qui est mise en avant par ses soutiens au pays de l’Oncle Sam. « Mme Okonjo-Iweala est une femme de vision dynamique qui peut guider l’OMC à travers son ère de réforme. Elle possède une combinaison très rare de leadership et d’expérience profondément ancrée dans le commerce international, la finance, l’économie et la diplomatie. Sa sélection, en tant que première Américaine et femme de couleur à occuper le poste de Directrice générale de l’OMC, enverra un message clair d’inclusion au reste du monde », affirme les signataires de cette lettre ouverte dont l’influent John Negroponte, ancien secrétaire d’Etat adjoint américain, Joseph E. Stiglitz, prix nobel d’économie en 2001 et ancien chef économiste à la Banque mondiale, Mimi Alemayehou, ancienne Vice-président de l’OPEC (désormais DFC).

Dressant une sorte de curriculum vitae détaillé et argumenté de Ngozi Okonjo-Iweala, le groupe de signataires constitué également de plusieurs anciens diplomates américains en Afrique ou d’ex-Monsieurs/Madames Afrique des Etats-Unis insistent sur la double nationalité de la Nigeria avant de conclure : « Ngozi Okonjo-Iweala est un dirigeant aux qualifications uniques, prêt à aider l’OMC à évoluer et à réussir pour les générations futures. Elle est une dirigeante sur laquelle on peut également compter pour accorder l’attention voulue aux préoccupations de nombreux Américains concernant le commerce mondial. Elle a ce qu’il faut pour mener les réformes de l’OMC et faire évoluer l’organisation vers l’avenir. […] Nous apprécions profondément toute considération que vous pourriez apporter à sa candidature, qui est d’une importance cruciale pour notre nation et le monde ».

Quand le lobbying impose sa loi ?

La loi du lobbying ? A ses premières heures certes, la candidature de Ngozi Okonjo-Iweala, aux côtés de celles de la Kényane Amina Mohamed et de l’Egyptien … (détenteur de la double nationalité suisse) n’a pas été ouvertement soutenue par l’Union africaine (UA) et plusieurs autres gouvernements africains. Mais lorsqu’elle s’est rester la seule candidate africaine en lice, les soutiens ont émergé, parfois par défaut, parfois bien affirmés. La première fortune africaine, son compatriote Aliko Dangote, à titre d’exemple, affichait son soutien sur Twitter en septembre dernier. Plusieurs autres personnalités de l’influent réseau d’Okonjo-Iweala à travers le monde ont signifié leur soutien à l’ex-directrice générale de la Banque mondiale et actuelle présidente du GAVI, l’alliance du vaccin financée par Bill Gates.

Il est clair qu’au-delà de ce qui est divulgué dans les médias, des tractations, coups de fils, conversations, négociations s’enchainent aux Etats-Unis autour de la candidature de l’ex-ministre nigériane des Finances. Mais les arguments utilisés par tous ceux qui multiplient les appels auprès de l’administration Biden soulèvent la question de savoir comment, dans ce contexte, Ngozi Okonjo-Iweala contribuera-t-elle à faire avancer l’agenda commercial africain. Un appel qui a notamment émané de plusieurs personnalités du continent. D’autant qu’avec sa Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf) fraichement opérationnelle, l’Afrique ambitionne de monter en puissance dans le commerce mondial dans lequel elle ne pèse qu’environ 1%.

Optimisme des deux côtés de l’Océan atlantique

Quoi qu’il en soit, le plus urgent pour le commerce mondial est de sortir de cette impasse. Alors que l’OMC était déjà aux prises dans la querelle Etats-Unis-Chine, la crise de Covid-19 a considérablement déstabilisé les fondamentaux commerciaux à travers le monde. Au moment où les regards sont tournés vers Washington, les analyses émises jusqu’ici sont plutôt optimistes. « Si M. Biden lève le bloc, la nomination de Mme Okonjo-Iweala sera acceptée. Bien qu’il y ait eu un certain soutien en faveur de Mme Yoo à Capitol Hill, la nomination de Mme Okonjo-Iweala semble peu susceptible de déclencher une tempête de protestations nationales. Cela contribuerait également considérablement à rassurer les autres membres de l’OMC sur le fait que l’administration Biden, tout en n’étant pas sans critique à l’égard de l’organisme commercial, est un gouvernement avec lequel ils peuvent s’engager. », analyse Financial Time au lendemain de l’investiture de Joe Biden.

Sur le continent, certains experts abondent dans ce sens. Dans un entretien avec The Punch Pat Utomi, président du Comité panafricain du commerce et de l’investissement du secteur privé (PAFTRAC) de l’Union africaine déclare : « Les États-Unis sous une présidence Biden seront plus multilatéralistes qu’unilatéralistes. L’attitude vis-à-vis de l’OMC sera légèrement différente. Je ne vois pas l’administration Biden s’opposer au leadership de Ngozi Okonjo-Iweala dans l’organisation ».

Par Ristel Tchounan

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