Ukraine : les sanctions imposées à la Russie par les Occidentaux en six questions

Les Occidentaux tentent d’organiser une réponse coordonnée à l’offensive russe à l’Est de l’Ukraine. Après la crise de 2014 qui avait débouché sur l’annexion de la Crimée, déclenchant déjà une série de sanctions, les Etats-Unis et les alliés de l’Otan visent huit ans plus tard d’abord le secteur financier russe. Un choix justifié par la crainte d’une flambée des prix de l’énergie, déjà secoués par deux ans de crise Covid.

L’économie russe peut-elle endiguer de nouvelles sanctions ? Y aura-t-il un impact sur le pouvoir d’achat des consommateurs européens ? L’enjeu des sanctions en six points.

Les Occidentaux ont déclenché une première série de sanctions à l’encontre de la Russie, au lendemain de la reconnaissance unilatérale de deux territoires séparatistes à l’est de l’Ukraine. Mais Vladimir Poutine continue de dérouler son jeu, ouvrant la voie à une possible escalade militaire aux portes de l’UE.

Mercredi, en guise de réponse à ces premières sanctions, le chef d’Etat russe s’est dit prêt « à un dialogue directe et honnête pour trouver des solutions diplomatiques aux problèmes les plus complexes« . Mais de marteler, après avoir ordonné le déploiement de troupes dans les deux régions du Donbass concernées, que « les intérêts et la sécurité de nos citoyens sont non-négociables« , dans un discours télévisé à l’occasion de la « Journée du défenseur de la Patrie ».

Autrement dit, malgré la pression qui va s’intensifier sur une économie dont le PIB est à peine supérieur à celui de l’Espagne (1.400 milliards de dollars en 2020, selon la Banque mondiale), Vladimir Poutine maintient sa position. A date, les Etats-Unis, l’Union européenne, la Grande-Bretagne, l’Australie, le Canada et le Japon ont déclaré vouloir imposer diverses sanctions. Aussi, la Finlande va mener une nouvelle « évaluation des risques » pour un projet de réacteur nucléaire associant le groupe russe Rosatom dans le nord du pays nordique, a annoncé mardi la Première ministre Sanna Marin.

Dans ce concert de sanctions, quels poids vont réellement avoir celles-ci dans le conflit ? Quels sont les risques pour les Occidentaux dans une économie mondialisée ? Tour d’horizon.

  •  1) Huit ans après la Crimée, viser le secteur bancaire est-il efficace ?

Si la première sanction a logiquement concerné le secteur gazier russe, cette stratégie ne devrait toutefois pas être la pierre angulaire de la riposte des Occidentaux. Dès mardi, l’Allemagne a certes décidé de suspendre la certification du gazoduc Nord Stream 2 la reliant à la Russie. La mise en service initialement prévue en 2022 de ce pipeline géant devait permettre à la Russie d’exporter 110 milliards de m3 de gaz naturel par an, soit la moitié de ses livraisons à l’Europe.

En réalité, cette suspension était réclamée depuis plusieurs mois par les Etats-Unis. Aussi, Washington a indiqué ne pas sanctionner directement les marchés mondiaux de l’énergie. « Les sanctions imposées aujourd’hui, et celles qui pourraient être décidées bientôt, ne visent pas les flux de pétrole et de gaz », a indiqué un responsable du département d’Etat américain, qui préfère conserver l’anonymat.

« Nous souhaitons que le marché note qu’il n’est pas nécessaire d’augmenter les prix pour le moment », rapporte l’agence Reuters.

L’effort diplomatique semble avoir vécu. Après des mois de tensions autour de l’Ukraine, le président russe, Vladimir Poutine, a choisi, lundi 21 février, de reconnaître les deux territoires séparatistes faisant partie de la région du Donbass – la « république populaire de Louhansk » et la « république populaire de Donetsk » – et a annoncé l’envoi de son armée en appui.

Pour les Occidentaux, l’heure est désormais aux sanctions graduelles contre Moscou. Quelle forme prendront ces représailles ? Quelles conséquences peuvent-elles avoir sur la Russie ? Ces mesures peuvent-elles, par effet de ricochet, pénaliser les Européens ?

Donbass, accords de Minsk, « format Normandie »

    Pourquoi utiliser l’arme des sanctions économiques ?

L’Ukraine ne fait pas partie de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), une alliance politico-militaire dont les membres s’engagent à se protéger mutuellement en cas d’attaque. Une intervention directe de l’Alliance atlantique sur le territoire ukrainien n’est donc pas envisageable. Concrètement, plusieurs pays fournissent du matériel militaire à Kiev, mais aucun n’enverra de troupes combattre sur son sol. Les sanctions économiques constituent un autre levier d’action pour faire pression sur le président russe, Vladimir Poutine.

les Etats-Unis défendent leur stratégie de sanctions graduelles contre la Russie

    Quelles sont les sanctions annoncées contre la Russie ?

Les Etats membres de l’Union européenne (UE) ont immédiatement condamné les décisions prises par le chef du Kremlin. Ils ont aussi traduit sans tarder leur colère en actes, en annonçant une première série de sanctions qui devaient entrer en vigueur mercredi.

Ces représailles visent d’une part des responsables politiques russes – désormais interdits de visa dans l’UE, où leurs avoirs seront gelés – et d’autre part des banques impliquées dans le financement des séparatistes prorusses – qui ne pourront plus émettre ou échanger des obligations sur les marchés européens. L’UE privilégie une approche graduelle et garde en réserve d’autres mesures pour faire face à une éventuelle escalade du conflit.

L’Allemagne a porté le coup le plus symbolique : le chancelier, Olaf Scholz, a annoncé mardi suspendre l’autorisation de Nord Stream 2. Achevé en novembre 2021, ce gazoduc, qui doit acheminer du gaz russe en Allemagne via la mer Baltique, n’a pas encore été mis en service.

Dans le sillage de Berlin, le président américain, Joe Biden, a annoncé mercredi des sanctions contre l’entreprise chargée d’exploiter le gazoduc Nord Stream 2, reliant la Russie à l’Allemagne. « Aujourd’hui, j’ai ordonné à mon administration d’imposer des sanctions contre Nord Stream 2 AG et ses dirigeants, a-t-il rapporté dans un communiqué. Ces mesures font partie de notre première tranche de sanctions en réponse aux actions de la Russie en Ukraine. »

Après l’offensive de Vladimir Poutine en Ukraine, l’Europe met en œuvre des sanctions graduelles contre la Russie

De son côté, le Royaume-Uni a décidé mardi de geler les avoirs de trois milliardaires considérés comme des proches de M. Poutine, et de les interdire sur le territoire. Les sanctions britanniques visent, en outre, cinq banques russes, dont Rossiya et Promsvyazbank, très actives pour financer l’industrie de la défense. « Nous ferons bien plus en cas d’invasion », a prévenu le premier ministre britannique, Boris Johnson.

En accord avec leurs alliés européens, les Etats-Unis ont choisi de couper les financements occidentaux de la Russie. Concrètement, Moscou ne peut plus lever de fonds aux Etats-Unis ou en Europe et ses nouvelles émissions de dettes ne peuvent plus être négociées sur les marchés financiers américains ou européens.

Deux banques publiques russes sont également visées – la Vnesheconombank et la Promsvyazbank – qui représentent 70 milliards d’euros d’actifs (ce qui est bien moins que les principales banques du secteur). Washington s’attaque aussi à cinq proches du président russe, qui voient leurs avoirs aux Etats-Unis gelés.

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