Venezuela: le groupe Chevron de retour sur le plus grand champ de pétrole au monde

Militant pour un retour du pétrole vénézuélien sur le marché afin d’alléger la pression sur les prix sur fond d’isolement de la Russie, les États-Unis ont immédiatement salué samedi l’accord entre Maduro et l’opposition du pays plongé dans une immense crise économique. Dans la foulée, Washington a annoncé un allègement de l’embargo pétrolier contre le Venezuela, autorisant Chevron à relancer -sous conditions- sa co-entreprise avec Petroleos de Venezuela (PdVSA, société d’Etat). L’accord de Mexico permettra de débloquer les fonds gelés à l’étranger pour financer des actions sociales urgentes en direction des Vénézuéliens, dont plus de 7 millions ont déjà fui le pays.

Le gouvernement américain a applaudi samedi, immédiatement après sa signature, l’accord obtenu entre le gouvernement et l’opposition vénézuélienne, y voyant « une étape importante dans la bonne direction ». Et quelques minutes après l’annonce d’un deuxième « accord partiel de protection sociale du peuple vénézuélien », l’administration Biden autorisait la compagnie pétrolière américaine Chevron à reprendre -partiellement- ses activités d’extraction dans le pays le plus riche en réserves de pétrole au monde.

À Mexico, le gouvernement et l’opposition vénézuéliens sont parvenus à s’entendre pour demander aux Nations unies de gérer des milliards de dollars détenus dans des banques étrangères, qui seront progressivement débloqués pour lutter contre la crise humanitaire qui sévit dans le pays. Les fonds gelés s’élèvent à plus de 3 milliards de dollars, avaient déclaré des sources à Reuters.

Des représentants du gouvernement vénézuélien, menés par le chef du Congrès Jorge Rodriguez, du Parti socialiste unifié (PSUV), sont arrivés à Mexico vendredi pour signer un accord avec leurs opposants politiques, représentés par l’homme politique Gerardo Blyde, après plus d’un an de gel des pourparlers.

Le fonds de « protection sociale » pourrait contribuer à empêcher les Vénézuéliens de fuir par millions (voir encadré en pied d’article) leur pays en améliorant l’accès à la nourriture, aux médicaments et aux soins médicaux, et en finançant des projets d’infrastructure notamment pour réparer le réseau électrique du pays, qui a subi de gigantesques pannes ces dernières années.

Allègement de l’embargo pétrolier américain anti-Maduro

Après un an d’interruption, les discussions avaient repris depuis mai, avec à la clé un assouplissement de certaines sanctions américaines anti-Maduro, allégement décidé à la suite de l’invasion de l’Ukraine par la Russie et de ses effets sur les prix du pétrole, qui ont conduit les Etats-Unis -et l’Union européenne- à réétudier leur position vis-à-vis de Caracas. Le gouvernement américain a admis publiquement que les hydrocarbures vénézuéliens pouvaient être utiles sur le marché international.

La guerre en Ukraine a tiré les prix du pétrole vers le haut, et les Etats-Unis en sont à puiser des millions de barils dans leurs réserves stratégiques pour faire baisser les cours du pétrole et les prix à la pompe sur leur territoire.

En mai, Washington avait déjà permis à Chevron de « négocier » son éventuelle reprise d’exploitation au Venezuela, ce qui représentait une première entorse à l’embargo sur le pétrole vénézuélien imposé par Washington en 2019 dans l’espoir d’évincer Nicolas Maduro.

Ce samedi, dans un communiqué, le département du Trésor a autorisé Chevron à relancer en partie sa co-entreprise avec Petroleos de Venezuela (PdVSA, société d’Etat). Chevron doit cependant s’assurer que « PdVSA ne reçoive aucun revenu des ventes de pétrole réalisées par Chevron ».

Chevron s’est engagé à respecter le « cadre réglementaire imposé », en confirmant avoir reçu l’autorisation de reprendre une partie de ses activités au Venezuela.

Stopper la crise humanitaire, réhabiliter les institutions démocratiques

En dépit des richesses naturelles du pays – le Venezuela est le premier pays, devant même l’Arabie Saoudite, en termes de réserves de pétrole brut -, le Venezuela connaît une très grave crise économique et ses habitants émigrent par millions pour fuir la misère. Le pays est confronté à des sanctions américano-européennes, dont un embargo pétrolier de Washington, afin de pousser le successeur de Hugo Chavez, président Nicolas Maduro au départ, aggravant du même coup la crise économique qui touche le Venezuela sans que soient obtenus les résultats escomptés sur le plan politique.

L’accord auquel sont parvenus les représentants du gouvernement de Nicolas Maduro et l’opposition politique vénézuélienne, samedi à Mexico, est un accord d’étape « en matière de protection sociale ».

Cet accord va permettre notamment de libérer les ressources vénézuéliennes bloquées à l’étranger, ceci afin de financer des projets sociaux.

Dans un communiqué commun, les Etats-Unis, l’Union européenne, le Royaume-Uni et le Canada ont « salué la décision de reprise du dialogue » entre les deux parties, après un an d’interruption.

Le bloc européen et les trois pays anglo-saxons ont encouragé le gouvernement Maduro et l’opposition vénézuélienne à « faire preuve de bonne volonté en vue d’un accord global conduisant à des élections libres et régulières en 2024, la réhabilitation des institutions démocratiques et la fin de la crise humanitaire au Venezuela ».

Ils ont ajouté qu’ils continueront « à travailler avec (leurs) partenaires internationaux pour répondre aux besoins urgents des Vénézuéliens dans et hors de leur pays » et assuré de leur « volonté de revoir le train de sanctions en cas de progrès substantiels de la part du régime » de Caracas.

Vers une levée des sanctions, mais le pays reste sous surveillance

Cette décision « reflète la politique de long terme des Etats-Unis visant à une levée des sanctions conditionnée à des avancées concrètes quant à l’allègement des souffrances du peuple vénézuélien et pour soutenir le retour de la démocratie » dans le pays, selon le communiqué du département du Trésor.

Un haut responsable de l’administration américaine a en revanche précisé que l’ensemble des autres sanctions « restent en place et les Etats-Unis continuent de les appliquer vigoureusement et de rendre comptable toute personne qui violerait la loi américaine, serait engagée dans la corruption ou le non-respect de l’Etat de droit au Venezuela ».

Par ailleurs, les personnes et entreprises américaines sont désormais autorisées à fournir certains types de biens et services au Venezuela, et les personnes étrangères qui participeraient à ces transactions ne feront pas l’objet de sanctions américaines.

Farouche opposant d’un relâchement de la pression contre le gouvernement vénézuélien, le très influent Bob Menendez, à la tête de la commission des affaires étrangères du Sénat américain, a estimé que l’accord signé est « un pas urgent et nécessaire pour faire face à la misère et aux souffrances du peuple vénézuélien », tout en ne se faisant « aucune illusion sur la soudaine volonté (du président vénézuélien) Nicolas Maduro d’agir dans le meilleur intérêt de son peuple ».

Un pays plongé dans une crise humanitaire majeure

Selon les estimations de l’ONU, plus de 7,1 millions de Vénézuéliens ont quitté leur pays cette année, beaucoup émigrant vers d’autres pays d’Amérique latine ou vers les États-Unis, alors que le pays lutte contre une forte inflation et des pénuries de nourriture et de médicaments.

Plus de la moitié des migrants vénézuéliens n’ont pas accès à trois repas par jour, selon les estimations de l’Onu.

Au Venezuela même, plus de la moitié de la population a connu une insécurité alimentaire modérée ou grave l’année dernière, selon une enquête menée par des universités locales.

(avec AFP et Reuters)

Challenges Radio

Read Previous

G20, sommet de la rivalité sino-américaine?

Read Next

Projet de pôle agro-industriel dans la région du Bélier : Des résultats probants pour 461 600 bénéficiaires

Leave a Reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.