Après avoir grimpé de 7,4% en avril à 8,1% en mai, l’inflation atteint désormais 8,6% en moyenne dans les 19 pays ayant adopté la monnaie unique. De quoi renforcer un peu plus la pression sur les ménages européens, mais aussi le risque de voir la croissance chuter et d’une fragmentation des taux d’intérêt.
Chaque mois, c’est un nouveau record qui est battu, celui de l’inflation. La veille, les chiffres français ont montré que la hausse des prix continuait son chemin vers des sommets inconnus dans le pays depuis de nombreuses années. Alors qu’il atteignait 5,2% sur un an en mai, l’indice des prix à la consommation a grimpé à 5,8% au mois de juin, selon une première estimation provisoire publiée jeudi par l’Insee.
La France n’est pas le seul pays à rencontrer ce phénomène. Ailleurs en Europe, l’Allemagne connaît une inflation de 8,2%, 9% au Royaume-Uni, 8% en Italie… Rien d’étonnant à ce qu’au sein même de la zone euro, la flambée des prix atteigne, aussi, des sommets.
Le taux d’inflation a, en effet, battu un nouveau record en juin, à 8,6% sur un an, selon les chiffres d’Eurostat, ce vendredi. Elle était de 7,4% en avril et 8,1% en mai pour les 19 pays ayant adopté la monnaie unique. Jamais, depuis que l’office européen des statistiques publie cet indicateur en janvier 1997, de tels niveaux n’avaient été recensés.
Et ce, depuis novembre, c’est-à-dire, avant le déclenchement de la guerre en Ukraine le 24 février. Mais celle-ci pèse lourdement en particulier sur les prix de l’énergie (électricité, pétrole, gaz…) qui atteignent des sommets. Cette composante de l’indice des prix bondit de 41,9% sur un an en juin, après 39,1% en mai. La progression des tarifs de l’alimentation (y compris alcool et tabac) s’accélère aussi à 8,9%, contre 7,5% en mai. La hausse des tarifs des biens industriels (+4,3%, après +4,2%), comme celle des services (+3,4%, comparé à +3,5% le mois précédent) s’est globalement maintenue.
Une inflation passée de « temporaire » à là « pendant encore un certain temps »
Ces records mensuels contredisent les premières projections de la Banque centrale européenne, dont la présidente Christine Lagarde affirmait il y a quelques mois de ça que la hausse des prix était transitoire. Désormais, elle ne peut qu’admettre que cette inflation « excessivement élevée » devrait le rester « pendant un certain temps encore » en zone euro, comme elle l’a expliqué mardi dernier, tout en assurant que la BCE ira « aussi loin que nécessaire » pour lutter contre ce phénomène qui grève le pouvoir d’achat des ménages européens.
Au-delà des difficultés pour les foyers, notamment pour se chauffer suite à la hausse des tarifs du gaz et de l’électricité, le contexte de prix à la hausse actuel fait peser la menace d’une chute brutale de la croissance du produit intérieur brut (PIB). C’est l’une des conséquences de la décision prise début juin par la BCE de relever ses taux directeurs de 25 points de base en juillet, avant une seconde hausse en septembre. Une stratégie qu’on adopté bon nombre de pays, dont les Etats-Unis, car elle permet, en limitant la consommation de contenir la hausse des prix mais pénalise, donc, la croissance.
Risque de fragmentation dans la zone euro
Une première depuis onze an, qui fait également resurgir le risque d’une crise de la dette en zone euro, avec des écarts croissants entre les taux d’intérêts demandés aux États du Nord et à ceux du Sud de l’Europe pour emprunter et financer leurs déficits. Pour éviter cette fragmentation, la BCE a d’ores et déjà promis un nouvel instrument « anti-fragmentation » à venir. Elle a également assuré qu’elle allait « appliquer une certaine souplesse dans le réinvestissement des remboursements arrivant à échéance dans le portefeuille PEPP en vue de préserver le fonctionnement du mécanisme de transmission de la politique monétaire ». Autrement dit, elle va réinvestir les remboursements récupérés dans le cadre programme d’achat d’actifs, PEPP, auprès de pays lourdement endettés et pour qui il serait dangereux de voir leurs taux d’emprunt trop augmenter, comme par exemple l’Italie.