« La France doit produire plus pour manger mieux », a affirmé la ministre de l’Agriculture Annie Genevard, livrant sa vision de la souveraineté alimentaire dimanche 23 février lors de l’inauguration du stand du ministère au Salon de l’agriculture.
« Dans ce moment de grand bouleversement de l’ordre international (…), la France doit affirmer sa souveraineté agricole comme un enjeu régalien et réarmer sa puissance alimentaire », a déclaré la ministre, appelant à « sonner la mobilisation générale ».
« La France doit produire plus pour manger mieux. Produire plus pour reconquérir l’assiette des Français, produire plus pour importer moins et garantir les standards de production que nous exigeons de nos paysans », a-t-elle ajouté, suscitant des applaudissements dans le public, largement composé de représentants du monde agricole (producteurs, interprofessions, syndicats, chambres d’agriculture…).
« Jouer dans la cour des grands »
« Produire plus pour rester une puissance exportatrice et jouer dans la cour des grands », a-t-elle poursuivi, déroulant une vision de l’agriculture largement dénoncée à gauche et par les défenseurs de l’environnement qui s’inquiètent de « régressions majeures » pour la protection du vivant et des sols.
La veille, le président de la République Emmanuel Macron s’était engagé à tout faire « pour protéger cette souveraineté alimentaire française et européenne » dans un monde instable où Pékin, Trump ou Poutine peuvent faire trembler vins, cognacs, fromages ou blés français. « Demain, rien ne nous dit que l’alimentation ne deviendra pas une arme et, donc, notre responsabilité c’est de produire sur notre sol ce qui nous permet de nous nourrir », a lancé le chef de l’État. Dans le discours d’Annie Genevard, pas une fois il n’est question de « transition agroécologique » – présentée comme une priorité du gouvernement jusqu’à l’an dernier. Au contraire, la ministre veut « tourner le dos aux partisans de la décroissance » et fustige vigoureusement les « idéologues » qui entretiennent « le fantasme d’une France agricole productiviste ».
« On invoque souvent la dette environnementale que nous pourrions laisser à nos enfants. Mais je ne veux pas non plus leur laisser une dette alimentaire », a-t-elle encore affirmé.
Vantant son bilan, elle a rappelé l’adoption réalisée ou en cours de lois agricoles facilitant la vie des producteurs, la mise en oeuvre de près « d’un demi-milliard d’allègements de charges », de mesures d’aide d’urgence ou de prêts garantis par l’Etat à hauteur de 70%.
Un discours applaudi par la FNSEA
« On a une ministre volontariste et bienveillante. Les prêts garantis pour une durée pouvant aller jusqu’à 12 ans, c’est une vraie respiration pour les agriculteurs en crise, c’est très concret », a réagi auprès de l’AFP Luc Smessaert, agriculteur dans l’Oise et un des vice-présidents de la FNSEA. Même satisfecit du rival Coordination rurale: son secrétaire général Christian Convers a salué « un très bon discours », affirmant que son syndicat, à la fois libéral et souverainiste, se reconnaissait « dans bon nombre des propos » de la ministre. Au contraire, la Confédération paysanne, troisième syndicat agricole qui défend une « réelle transition agroécologique », a décidé de boycotter le discours de la ministre dimanche ainsi que tous les événements protocolaires du Salon.
Le budget de l’Agence bio un temps menacé, la possible réintroduction des insecticides néonicotinoïdes – très toxiques pour les pollinisateurs – et « toujours pas de mesures » pour garantir aux agriculteurs des prix minimum en fonction de leurs coûts: « tout cela est extrêmement choquant », s’est indignée la porte-parole nationale Laurence Marandola, qui compte toutefois continuer de travailler avec le gouvernement mais sans s’afficher à ses côtés.
Source reportage salon de l’Agriculture