Commerce extérieur : la France échappe à la tempête américaine
Donald Trump et Xi Jinping viennent de conclure un accord – non encore écrit cependant – qui pourrait apaiser les relations tumultueuses entre les États-Unis et la Chine. Mais le déséquilibre commercial reste immense entre les deux premières puissances mondiales, qui restent rivales.
Cela faisait six ans – lors du premier mandat de Donald Trump – qu’ils ne s’étaient pas revus. Et le moment était d’importance, puisqu’il s’agissait d’officialiser, enfin, un cessez-le-feu dans la guerre commerciale qui déstabilise les relations entre les deux premières puissances mondiales.
Et pourtant, c’est dans le triste cadre d’un aéroport militaire, à Busan, dans un État tiers, la Corée du Sud, qu’a eu lieu, le 30 octobre, la rencontre tant attendue entre Donald Trump et Xi Jinping. Celle-ci n’intervenait qu’à l’issue d’une tournée asiatique du président américain, précisément destinée à resserrer les liens des États-Unis avec ses alliés voisins de la Chine.
Le président américain a multiplié boutades et tapes dans le dos pour détendre l’atmosphère face aux caméras. Mais son homologue chinois ne s’est pas départi d’un demi-sourire glacial.
Un accord qui reste à écrire
C’est pourtant sinon un accord formel et détaillé – qui reste à écrire – du moins l’espoir d’une trêve dans la guerre commerciale entre Washington et Pékin qui a été annoncé après une rencontre d’une heure quarante-cinq.
Les préparatifs avaient cependant été chahutés par l’annonce par Pékin, deux semaines seulement avant la rencontre, de restrictions drastiques non seulement sur les terres rares, mais aussi sur les batteries au lithium, les aimants permanents et les semi-conducteurs. Et ce où qu’ils soient produits dans le monde par des entreprises chinoises.
Xi Jinping a ainsi démontré à nouveau que, contrairement à l’Union européenne, il peut être aussi brutal que Donald Trump et qu’il lui tient tête d’égal à égal.
Les États-Unis dépendent à plus de 50 % de la Chine pour huit matières premières critiques, dont le groupe des 17 métaux appartenant au groupe des terres rares, sans lesquels on ne peut produire ni aimants à haute performance ni composants électroniques. Le département américain de la Défense lui-même admet cette dépendance pour ses équipements militaires.
Une tech triomphante mais fragilisée par les terres rares
Les sommets qu’atteignent en bourse les champions américains du numérique, à l’instar de Nvidia, dont la valeur dépasse, depuis le 30 octobre, celle de tout le Cac 40 français, rappellent la dépendance de l’économie américaine à quelques métaux précieux produits de l’autre côté du Pacifique.
L’accord conclu à Busan, pour un an seulement, devra cependant être révisé ensuite. Il prévoit de dénouer plusieurs points de crispation. Tout d’abord, la Chine desserre son étau sur les terres rares. Elle relance également ses importations de soja américain dont elle achète traditionnellement entre un tiers et un quart de la production.
La Chine, si elle achète également massivement la précieuse légumineuse en Amérique du Sud, a cependant besoin du soja américain pour compléter l’approvisionnement de ses gigantesques élevages, notamment de porc.
Elle va également annuler les hausses de droits de douane qu’elle avait décidées en mars sur la quasi-totalité des produits agricoles américains. Pékin s’est également engagé à freiner les exportations de fentanyl, l’un de ces opioïdes de synthèse qui font 50 000 à 70 000 morts par an aux États-Unis.
Un accord, non précisé, aurait également été trouvé sur le rachat du média chinois Tik Tok, dont Donald Trump veut qu’il soit sous contrôle américain, au moins aux États-Unis.
En revanche, rien n’a été concédé clairement pour lever les restrictions imposées par Washington sur les exportations vers la Chine des composants électroniques les plus performants, notamment les fameuses cartes graphiques de Nvidia si précieuses aux data centers qui alimentent les serveurs d’intelligence artificielle.
Des droits de douane qui restent élevés
De leur côté, les États-Unis vont suspendre l’enquête en cours sur la construction navale chinoise, au nom de laquelle ils ont instauré une taxe sur les escales de navires – très nombreux – construits en Chine.
Surtout, ils doivent revoir à la baisse leurs droits de douane, les fameux « tariffs » sur les produits de chinois. En avril, ils avaient été portés à 164 % côté américain et 146 % côté chinois, avant d’être ramenés à 49 % et 31 % en mai, dans le cadre d’une précédente trêve, avant de faire l’objet de nouvelles hausses et menaces.
Ils seront désormais stabilisés à 47 %. Ce qui compte tenu des épisodes du bras de fer imposé par Donald Trump depuis son retour au pouvoir en janvier dernier, apparaît comme un signe d’apaisement. Mais reste en réalité un vrai obstacle tarifaire. Avant son premier mandat, en 2017, les « tariffs » américains sur les produits chinois n’étaient que de 2,7 % (et de 8 % côté chinois).
Au gré des coups de menton et coups de colère, Donald Trump installe donc ce coup de frein au principal foyer du déficit commercial des États-Unis. Leur solde négatif avec la Chine a atteint 295 milliards de dollars l’an dernier. Et déjà 128 milliards sur les sept premiers mois de l’année.
Malgré cela, Xi Jinping a déclaré que « le développement et le renouveau de la Chine ne sont pas incompatibles avec le but du président Trump de rendre sa grandeur à l’Amérique ». Donald Trump a, lui, estimé que « sur une échelle de 1 à 10, cette rencontre valait 12 ».
Il a été convenu que Donald Trump se rendrait en Chine en avril et que Xi Jinping lui rendrait la pareille ensuite. Amabilités entre deux puissances, interdépendantes mais plus que jamais rivales.
Source Sud Ouest
