L’offensive russe en Ukraine, commencée le 24 février, a déjà fait plus de trois millions de déplacés. Et son impact sur la sécurité alimentaire inquiète, car la Russie et l’Ukraine pèsent pour un tiers des exportations mondiales de céréales. Et une part importante est destinée au continent africain et au Liban. Face à des risques graves de crise alimentaire, les États du continent multiplient les mesures pour tenter de limiter l’inflation et les ruptures de stocks.
L’Algérie est le dernier pays en date à prendre des dispositions face aux risques de crises alimentaires en lien avec la guerre en Ukraine. Elle fait déjà face à des tensions de certains produits alimentaires sur ses marchés et a donc décidé ce week-end d’interdire l’exportation de produits de consommation dont la matière première est importée. Le sucre, les pâtes ou encore la semoule sont concernés. Un projet de loi est même en cours d’élaboration pour pénaliser ces exportations, considérées comme « un acte de sabotage de l’économie nationale ».
Même type de restrictions en Égypte, plus gros importateur mondial de blé. Les pays d’Afrique tentent de préserver leurs ressources alimentaires et cherchent à limiter l’inflation. Des mesures ont ainsi été prises ces dernières semaines par le Bénin, la Côte d’Ivoire ou encore le Mali. Dans certains pays comme le Nigeria, des appels à agir se font entendre. Le milliardaire Aliko Dangote s’est dit inquiet d’une pénurie de maïs et plus largement d’une crise alimentaire « imminente ». Les analystes prévoient une inflation importante de certaines denrées alimentaires sur le continent. Le Soudan, par exemple, connaît déjà des marches contre la vie chère.
La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) estime que 28 millions de personnes dans la région pourraient se trouver en insécurité alimentaire. Le continent a déjà été affecté par la crise du Covid-19. Le conflit ukrainien vient exacerber ces problématiques de dépendance alimentaire et de certains produits manufacturés.
Alain Sy Traoré est le directeur de l’agriculture et du développement rural à la commission de la Cédéao. Pour lui, deux phénomènes majeurs sont à prévoir avec ce nouveau conflit : l’augmentation des prix des engrais et la diminution des stocks de céréales avec la cessation des importations de céréales d’Ukraine et de Russie. Il ne cache pas son pessimisme :
« Les stocks sont à leur plus faible niveau. (…) Que ce soit pour les engrais ou pour les céréales, nous sommes à une période où les commandes auraient normalement déjà dû être passées »