Le relèvement de 75 points de base des taux a été salué par les marchés financiers. Après l’avoir sous-estimée durant des mois, la Fed est décidée à maîtriser une inflation dont la hausse a surpris en mai. Elle devrait atteindre 5,2% en 2022 et 2,6% en 2023 contre 4,3% et 2,7% estimés en mars, selon les nouvelles projections de la Fed. Le cycle de hausse des taux directeurs devrait atteindre entre 3,25% à 3,50% d’ici à la fin de l’année.
« Nous devons assurer la stabilité des prix », tel est le leitmotiv de l’intervention de Jerome Powell, son président, pour justifier un relèvement des taux directeurs de la Réserve fédérale américaine de 75 points de base (0,75 point de pourcentage).
Les marchés financiers ont apprécié cette volonté affichée de lutter contre l’inflation galopante. A la Bourse de New York, l’indice Dow Jones a progressé de 1%, le S&P 500 a gagné 1,46% et le Nasdaq, à forte coloration technologique, a grimpé de 2,50%.
En Asie ce matin, la Bourse de Tokyo remontait nettement dans le sillage de la veille à Wall Street. L’indice vedette Nikkei gagnait 2,14% à 26.890,12 points, et l’indice élargi Topix prenait 1,91% à 1.891,33 points.
Dans les premiers échanges à Hong Kong, l’indice Hang Seng gagnait 0,97% à 21.515,64 points. Quant à l’indice composite de la Bourse de Shanghai, il était en très légère hausse de 1,43 point, à 3.306,84 points, tandis que la place de Shenzhen était également en progression infime de 0,63 point, à 2.099,63 points.
Intervention surprise de la BCE
Plus tôt dans la journée de mercredi, la Banque centrale européenne (BCE) avait tenu une réunion surprise pour annoncer la mise en place d’un mécanisme de soutien aux économies de la zone euro dont les taux s’étaient envolés la veille menaçant de fragmentation la monnaie unique. Ainsi, après six séances de recul, les indices européens se sont repris. Milan est remonté de 2,87%, Francfort de 1,36%, Paris de 1,35% et Londres de 1,20%. La BCE doit normalement amorcer en juillet un cycle de hausse de ses taux, le premier depuis 11 ans.
En opérant sa plus forte hausse des taux depuis 1994, la banque centrale américaine se veut « déterminée » à lutter contre l’inflation galopante. Cette hausse « est inhabituellement importante », a souligné le patron de la Fed, Jerome Powell, lors de sa conférence de presse. Il s’agit de la troisième hausse consécutive de ces taux, qui se situent désormais dans une fourchette comprise entre 1,50 à 1,75%, et donnent le ton pour les crédits accordés aux particuliers et entreprises.
Mais il faut s’attendre à d’autres relèvements du même ordre dans les mois à venir : « Dans la perspective d’aujourd’hui, une augmentation de 50 points de base ou de 75 points de base semble très probable lors de notre prochaine réunion », fin juillet, a d’ores et déjà prévenu le patron de la Fed. Ramener l’inflation autour de 2%, l’objectif cible, est devenue la priorité. La majorité des responsables de l’institution voient les taux grimper, d’ici à la fin de l’année, jusqu’à la fourchette de 3,25% à 3,50%.
Les chiffres de l’inflation en mai, publiés vendredi, avaient blzfait l’effet d’une douche froide : la hausse des prix n’a pas ralenti, comme cela avait été le cas en avril. Elle a même atteint un nouveau record en 40 ans, à 8,6% sur un an. La Fed privilégie une autre référence, l’indice PCE, dont les données pour mai seront publiées le 30 juin.
Les responsables de la Réserve fédérale ont également révisé mercredi à la hausse leurs projections d’inflation, tablant désormais sur 5,2% en 2022 et 2,6% en 2023, quand ils prévoyaient, en mars, respectivement 4,3% et 2,7%.
Déséquilibre entre l’offre et la demande
L’inflation demeure « élevée, reflétant les déséquilibres entre l’offre et la demande liés à la pandémie, les prix de l’énergie plus élevés et plus largement les pressions sur les prix », a souligné la Fed. L’institution rappelle que l’invasion russe en Ukraine et les sanctions contre la Russie ont créé « des pressions supplémentaires à la hausse sur l’inflation et pèsent sur l’activité économique mondiale ». En outre, les confinements anti-Covid-19 en Chine ont exacerbé les problèmes sur les chaînes d’approvisionnement.
Ce contexte général ralentit l’économie américaine. Désormais, la Fed anticipe une croissance économique moins forte que prévu cette année aux Etats-Unis, à 1,7%, contre 2,8% précédemment. Elle s’attend par ailleurs à ce que le taux de chômage s’élève à 3,7% fin 2022 et 3,9% en 2023, quand elle le voyait auparavant à 3,5%, son niveau de février 2020, juste avant la crise sanitaire, le plus bas depuis 50 ans.
La Fed se démène d’autant plus pour juguler l’inflation que sa crédibilité est en jeu. Ses responsables ont affirmé pendant des mois que cette hausse des prix ne serait que temporaire, et ont par conséquent commencé seulement en mars à resserrer la vis. Mais contrôler l’inflation sans faire plonger la première économie du monde en récession s’avère particulièrement délicat.
Éviter d’aller trop ou pas assez loin
« Que ce soit clair, nous ne sommes pas en train d’essayer d’induire une récession », a rétorqué Jerome Powell. « Nous essayons de ramener l’inflation à 2% (et conserver) un marché du travail solide. » Il avait estimé en mai que contrôler l’inflation sans récession restait atteignable, quoique difficile.
« Jay » Powell a reconnu qu’il y avait « toujours un risque d’aller trop loin ou pas assez loin », mais que « la pire erreur (…) serait d’échouer (à contrôler l’inflation), ce qui n’est pas une option ».