« stabiliser » la croissance : les priorités de la Chine en 2022

La deuxième économie mondiale est-elle en train de se mettre en ordre de marche pour affronter une nouvelle phase de tensions, tant commerciales, dans un contexte de reprise poussive post Covid-19, que diplomatiques ? Quelques jours après le déclenchement de la guerre en Ukraine par la Russie, Pékin a annoncé, lors de la grand-messe annuelle du parti communiste, que ses dépenses militaires vont progresser de 7,1% cette année, soit nettement plus que le PIB. Il s’agit de la plus forte progression depuis trois ans.

« Beaucoup plus de risques »: avec les incertitudes liées au Covid et à la guerre en Ukraine, la Chine se prépare à un ralentissement de sa croissance cette année, a annoncé samedi Li Keqiang, le Premier ministre, lors de la grand-messe annuelle du régime communiste.

Dans son discours devant les quelque 3.000 députés de l’Assemblée nationale populaire (ANP), le Premier ministre n’a pourtant fait aucune référence à l’invasion russe de l’Ukraine entamée le 24 février, que Pékin refuse de condamner au nom de l’amitié qui lie le géant asiatique à Moscou.

Mais dans ce contexte particulier, la Chine a annoncé samedi un coup d’accélérateur sur ses dépenses militaires, faisant craindre de nouvelles escalades liées à sa rivalité avec Taïwan et les riverains de mer de Chine méridionale. La Chine y revendique sa souveraineté (vis-à-vis notamment du Vietnam et des Philippines), ainsi qu’en mer de Chine orientale (sur les îles Senkaku contrôlées par le Japon) et dans l’Himalaya (face à l’Inde).

Le budget militaire augmentera en effet de 7,1% cette année, a annoncé le ministère des Finances, à l’ouverture de la session plénière annuelle.

Il s’agit de la plus forte progression depuis 2019 (+7,5%).

Le mois dernier, Xi Jinping a ordonné à toutes les unités militaires de mener des « exercices orientés vers le combat » et d’améliorer leurs capacités en matière « d’affrontements informatiques ».

Avec cette enveloppe de 1.450 milliards de yuans (230 milliards de dollars), la Chine dispose du deuxième budget de défense mondial, après les Etats-Unis (740 mds USD prévus pour 2022).

La croissance revue à la baisse

Dans le même temps, après deux ans de Covid, Li Keqiang a fixé pour cette année un objectif de croissance « d’environ 5,5% », contre « au moins 6% » prévu en 2021.

L’an dernier le produit intérieur brut (PIB) du géant asiatique avait progressé de 8,1% sur un an. Mais cette performance était en grande partie due à l’effet de rattrapage par rapport à 2020, quand l’activité avait été paralysée par le Covid.

Ce rythme serait néanmoins en 2022, hors période de Covid, le plus faible pour la Chine depuis le début des années 1990.

« La pandémie de Covid-19 est toujours en cours, la reprise mondiale manque de dynamisme et le prix des matières premières reste élevé […] ce qui rend la conjoncture volatile, difficile et incertaine », a dit le Premier ministre chinois.

La croissance s’est en effet essoufflée en cours d’année (+18,3% au 1er trimestre 2021 contre 4% au dernier).

La priorité est de « stabiliser » la croissance, a insisté le Premier ministre, utilisant le terme 28 fois, au moment où l’économie chinoise fait face à de multiples défis.

ZOOM : la trajectoire économique de la Chine en 2022

La Chine peut-elle « stabiliser » sa croissance alors que pèse au-dessus d’elle le risque de faillites en chaîne dans le secteur immobilier ? De fait, les déboires non résolus du promoteur géant Ever grande, au bord de la faillite, refroidissent les acheteurs et l’ensemble du secteur.

L’immobilier et la construction, qui pèsent plus du quart du PIB du pays, avaient joué un rôle clé dans la reprise post-pandémie en 2020.

Du côté de l’emploi et du chômage, Pékin se fixe comme objectif de créer cette année quelque 11 millions d’emplois, un chiffre en baisse par rapport à 2021 (12,69 millions).

Ce critère ne renseigne en rien sur le nombre d’emplois détruits à cause de la crise sanitaire.

La Chine s’attend d’ailleurs à une hausse du taux de chômage cette année. Mais il « ne dépassera pas 5,5% », a assuré Li Keqiang. Ce chiffre est supérieur à celui de l’an dernier (5,1%) mais moindre que le record absolu de 6,2% en février 2020, au plus fort de l’épidémie.

Là aussi, ce chiffre dresse un tableau incomplet de la conjoncture: en Chine, le chômage est calculé pour les seuls urbains.

Côté déficit et inflation, en pleine reprise post-Covid, la Chine avait creusé son déficit budgétaire à 3,2% du PIB.

En 2022, ce ratio sera ramené autour de 2,8%. Ce chiffre est identique à celui de 2019, avant la pandémie.

Quant à l’inflation, l’objectif est fixé à 3% contre 0,9% l’an dernier, sur fond de flambée des cours mondiaux des matières premières.

Face au fléchissement de sa croissance, Pékin compte soutenir PME et auto-entrepreneurs, ses principaux viviers d’emplois.

Les mesures fiscales et réductions d’impôt en 2022 sont estimées à 2.500 milliards de yuans (361,8 milliards d’euros).

Les remboursements de TVA représenteront 1.500 milliards de yuans (217,1 milliards d’euros) qui « iront directement aux entreprises« , s’est félicité Li Keqiang.

Après 10 ans à la tête de la deuxième puissance mondiale, le président Xi Jinping vise lui un troisième mandat inédit grâce à un amendement de la Constitution en 2018.

(Avec AFP)

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