BCE: de nouvelles hausses de taux en 2023 de manière graduelle

La Banque centrale européenne va probablement prolonger son cycle de hausse de taux au-delà de 2022 pour contrer l’inflation, due notamment à la crise énergétique provoquée par la guerre en Ukraine. D’où l’appel à la retenue lancé par le chef économiste de l’institution, Philip Lane, aux salariés et entreprises : une augmentation trop brutale des marges et/ou des salaires risquerait de rendre la hausse générale des prix totalement incontrôlable.

La hausse des taux amorcée par la Banque centrale européenne (BCE) afin de contrer l’inflation galopante – +10,7% dans la zone euro – n’est pas prête de s’arrêter. Alors que la prochaine réunion de l’institution se tiendra dans moins d’un mois, son chef économiste a ainsi déclaré, ce lundi 21 novembre dans une interview à Market News : « Je ne pense pas que décembre sera la dernière hausse des taux ».

Point positif mis en avant par le chef économiste toutefois : le contexte ne permet plus d’ « envisager une très grande hausse, comme 75 points de base », soit 0,75%, à l’instar des annonces « jumbo » de septembre et d’octobre. Dans son élan la BCE doit tenir compte du fait que la zone euro devrait entrer en récession cet hiver, même si celle-ci sera probablement « légère et de courte durée », veut croire Philip Lane.

Pour rappel, la BCE a récemment augmenté les taux à son rythme le plus rapide jamais enregistré, les relevant d’un total de 200 points de base depuis juillet et portant son principal taux à 1,5% en seulement trois mois.

L’ombre d’une inflation incontrôlable

Quant à la question de savoir si l’inflation va bientôt atteindre son pic, le responsable de la BCE se montre très prudent. Selon lui, l’agrégat va rester dynamique avec des « prix de l’énergie l’année prochaine (qui) devraient rester plus élevés que prévu », prévient-il.

D’où un avertissement lancé à la fois aux entreprises qui « doivent faire attention à ne pas augmenter excessivement leurs marges », et aux salariés qui « doivent faire attention à ce qu’est une augmentation salariale soutenable » sur le long-terme. La BCE redoute que ne s’enclenche une boucle salaires-prix qui rendrait l’inflation totalement incontrôlable et pourrait faire dérailler son scénario de retour progressif de l’indicateur à sa cible de 2%.

En Allemagne, près de 4 millions de salariés du secteur industriel, dans l’électronique et la métallurgie, ont obtenu vendredi une hausse de salaires de 8,5% sur deux ans, après des négociations difficiles avec le patronat.

Les déclarations du responsable de l’institution de Francfort laissent « la désagréable impression que l’inflation échappe au contrôle de la BCE », a commenté Frederik Ducrozet, chef économiste chez Pictet, sur Twitter.

Même stratégie qu’aux États-Unis

Continuer à relever les taux, mais à un rythme plus lent que précédemment est aussi la stratégie que devrait prendre la Banque centrale américaine (Fed). Sa vice-présidente, Lael Brainard a entrouvert la porte à cette éventualité la semaine dernière. « Je pense qu’il sera bientôt approprié d’aller vers un rythme plus lent » de hausses des taux, a-t-elle affirmé à l’agence Bloomberg.

Une intervention qui se fait dans un contexte d’essoufflement de l’inflation dans l’économie américaine. Celle-ci est retombée à 7,7% sur un an en octobre contre 8,2% en septembre. Ce qui est perçu comme « rassurant » par la responsable de la Fed, dont la prochaine réunion se tient les 13 et 14 décembre. Pas question pour autant d’après elle d’abaisser maintenant les taux directeurs : « Nous avons encore du travail sur les hausses de taux », considère-t-elle.

Face à une inflation inédite en deux décennies aux États-Unis, au-dessus de 8%, la Fed poursuit depuis le mois de mars une politique de remontée de son taux directeur tombé à un niveau historiquement bas ces dernières années. Ce durcissement monétaire vise à contracter les crédits aux ménages et aux entreprises, en augmentant leur taux, pour in fine ralentir l’activité économique, la demande et la pression sur les prix.

Depuis le mois de juin quatre fortes hausses, équivalentes à trois-quarts de point de pourcentage chacune contre un quart de point de hausse habituelle, se sont succédé. Désormais, le taux directeur de la banque centrale américaine oscille entre 3,75% à 4,00%, un niveau inédit depuis la crise financière de 2008.

La Chine s’inquiète des taux de la Fed et de la BCE

Le durcissement monétaire des banques centrales américaines et européennes fait faiblir la consommation et la demande de biens de ces deux économies au bord de la récession. Une situation qui inquiète la Chine, qui exporte massivement vers ses deux zones et souffre déjà de la paralysie de son économie à cause du Covid.

À l’occasion du G20, qui s’est tenu la semaine dernière à Bali en Indonésie, le président chinois Xi Jinping a fait part de ses préoccupations à ce sujet. « Les économies développées doivent réduire les effets de contagion négatifs de leurs ajustements de politique monétaire et stabiliser les dettes à un niveau durable », a-t-il réclamé au lendemain d’une rencontre avec son homologue américain Joe Biden.

Par la rédaction

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