Les Etats-Unis incités à intensifier les investissements dans les matières premières en Afrique

Dans une étude fraichement dévoilée à Washington, l’Institut américain pour la paix appelle le gouvernement à devenir commercialement plus agressif dans le secteur des minerais stratégiques en Afrique, afin de « garantir » son avenir économique et sécuritaire, dans un contexte de domination de la Chine, d’avancée de la Russie et d’intérêt croissant des pays du Golfe.

Cobalt, graphite, manganèse, lithium, nickel… Cinquante ressources minérales stratégiques sont actuellement « jugées essentielles » pour la sécurité économique et nationale des Etats-Unis. Alors que Washington continue de dépendre des importations en provenance de Chine, l’institut américain pour la paix (USIP) estime urgent d’accélérer le changement de stratégie américaine en misant sur l’axe africain. « Si les États-Unis veulent rester compétitifs sur la scène mondiale, ils doivent intensifier leurs efforts pour diversifier leurs chaînes d’approvisionnement en minéraux essentiels, y compris en Afrique », recommandent les experts.

Appel à « une diplomatie commerciale plus vigoureuse »

 

 

« Le gouvernement américain devrait pratiquer une diplomatie commerciale plus vigoureuse en s’efforçant de nouer des partenariats essentiels dans le domaine des minéraux en Afrique » ajoutent-ils, soulignant que «l’Afrique peut jouer un rôle important dans le renforcement de la sécurité de la chaîne d’approvisionnement en minéraux essentiels aux États-Unis ».

Livrés dans une guerre d’influence internationale contre la Chine, les Etats-Unis tentent depuis plusieurs années de tracer des voies pour être commercialement moins dépendant de l’Empire du Milieu, mais l’exercice semble ne pas être si simple que cela. En Afrique, les Etats-Unis se sont notamment positionnés au Mozambique pour un projet d’exploitation de graphite, un des cinquante minerais pour son avenir et dont sa dépendance vis-à-vis de la Chine est quasi-totale. L’Usip estime que de telles initiatives devraient être multipliées.

Face à des concurrents de plus en plus nombreux

Dans son étude, l’Institut américain pour la paix regrette la faible présence américaine sur les marchés africains des minerais, au moment où les Chinois ont pris une longueur d’avance et où « le groupe paramilitaire Wagner dirigé par la Russie au Mali, au Soudan et ailleurs sont des exemples d’une longue histoire d’activités minières prédatrices en Afrique », accusent-ils, soulignant également la montée d’autres acteurs. « La liste des concurrents économiques en Afrique s’allonge, les États du Golfe et d’autres intensifiant leur intérêt pour les minéraux critiques africains », déclarent les experts de l’Usip estimant que renforcer la compétitivité américaine équivaut à « de nouveaux investissements dans des partenariats avec les pays africains pourraient contribuer à stimuler le développement économique et à renforcer la paix et la sécurité sur le continent africain ». Il s’agirait alors pour les américains de jouer à contre-courant de l’approche chinoise souvent critiquée, car ne contribuant pas conséquemment au développement économique des pays.

En toile de fond de cet appel à une course effrénée autour des minerais stratégiques africains : la transition énergétique qui va continuellement accroitre la demande en minerais stratégiques. Les auteurs de l’étude ont listé treize recommandations qui lui baliseraient le chemin vers les mines africaines. Ils évoquent entre autres le soutien à l’autonomisation de la société civile et des médias, la signature d’un accord tripartite entre les Etats-Unis et la République démocratique du Congo et la Zambie pour leur projet industriel de batteries électriques, mobiliser le secteur privé américain pour le développement des infrastructures en Afrique ou encore multiplier les agences diplomatiques et commerciales dans les centres miniers africains.

Depuis Donald Trump, les Etats-Unis ont, à plusieurs titres, démontré leur volonté de renforcer leur influence économique sur le continent africain dans le but de peser dans la géopolitique mondiale dont l’ordre tend à changer. Si les banques américaines se sont plutôt montrées risquophobes, l’Etat mise davantage sur ses entités publiques, pour inciter le secteur privé à se joindre à l’aventure. Alors que l’Usip est influent aux Etats-Unis, reste à savoir ce que Washington – qui en pleine fièvre électorale en vue de la désignation du prochain président – mettra en place en direction des minerais stratégiques africains. Reste également à voir comment les pays africains réagiront contractuellement, face à cet énième appel autour de ses minerais stratégiques.

Ristel Tchounand

Challenges Radio

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