Environnement : vivement des villes vertes en Afrique !

Dans une Afrique aussi bouillonnante que celle qu’il est possible d’observer, de sentir et de vivre entre ces lignes, le goût du paysage semble fuguer à mesure que les villes évoluent et tentent de se réinventer. Il est temps d’imprimer un « Wanted » pour rattraper la nature qui s’enfuit.

Les paysages vivifiants, paraissent ne plus être perçus, ressentis et vécus dans leur intacte majesté, que par des personnes qui en ont développé le sens. On pourrait même dire que le paysage n’est plus réduit qu’a un vulgaire décor, entourant le quotidien des villes africaines. Mutilé. Invisible. Car les villes du continent ne donnent plus à goûter à la beauté de la nature. C’est parfois au bout d’une quête vaine qu’on se rend à l’évidence qu’il faut y faire revenir cette nature, aujourd’hui remplacée par de fades aménagements et des constructions ternes. Le sentiment d’inachevé que ressentent ceux qui, de plus en plus nombreux, regrettent la communion perdue villes anciennes avec la nature, incite à repenser cette union sacrée, vitale au devenir de nos cités.

Protéger la nature contre nous-mêmes

La nature embellit, anime, sympathise avec le cœur humain, sait-on. Le paysage naturel aujourd’hui déchiré, dégradé et de plus en plus vandalisé, est criant du coup porté à l’environnement vital de l’homme. « Les villes, non contentes de le ronger à leurs franges, l’attaqueraient en tous points, menaçant sa cohésion profonde. […] Les espèces animales et végétales se raréfient, la pollution atteint les rivières, les étangs, les mers, les airs, la terre ; les dernières communautés rurales dépérissent, mais la laideur aussi envahit le champ de notre regard où que nous allions. En un mot, la nature, la belle nature est menacée. Il nous faut la protéger contre nous-mêmes ». Ce juste propos de René Louis de Girardin, trouve du sens, aujourd’hui, en Afrique plus qu’ailleurs.

Nous avons poussé la nature dans son expression la plus sublime, à se réfugier dans ses derniers retranchements, dans les lieux les plus inaccessibles, dans le sauvage, loin des villes. La société industrielle ayant privé l’humanité des richesses naturelles, jadis crues inépuisables ; nous plonge aujourd’hui dans la finitude d’un monde où les plus vieux trésors, tel que l’eau, l’air et les arbres nous sont retirés au profit des « biens » produits par l’industrialisation massive. Dans une somme d’efforts visant à révéler sa suprématie, l’Homme a voulu dompter la nature en bousculant à répétition ses relations d’interdépendance avec elle, les menant peu à peu à une coexistence aujourd’hui douloureuse. Les villes sont la marque vivante de cette histoire qui a révélé l’élasticité du génie humain. Produisant des outils visant à étendre ses limites, il a vaincu les résistances apparentes d’une nature avec qui sa relation de connivence reste malgré tout congénitale. La technique s’est violemment employée à assujettir la terre pour aménager le territoire en géométrisant et en homogénéisant sans égard aux impacts environnementaux.

Vivement les villes vertes d’Afrique

C’est à la mesure des dégradations causées que le souci du paysage s’insinue de plus en plus, dans les esprits de quelques-uns, et se révèle avec insistance aux plus vigilants d’entre-eux, devant une nature abusée et plus que jamais vulnérable. Reprenant pour elle la paix et la tempérance qu’elle offrait, la nature se rebelle parfois et se venge souvent. Elle se venge plus qu’elle ne se rebelle, et cela, dans l’eau qui érode, dans le vent qui emporte, dans la canicule qui fait danser l’air au ras du sol, séchant les argiles dans le même temps.

C’est dans la démesure des dégradations causées que le paysage agonisant est devenu le reliquat de l’enlisement du continent dans la construction de villes qui racontent une histoire dénuée de sens, dès lors qu’elles disent leurs maux plus qu’elles ne révèlent leur identité. Le paysage urbain revêt ainsi une réalité qui échappe aux standards de la nature mais qui n’en est pas moins lisible et compréhensible. Il faut toutefois, pour en être capable, refuser de voir dans les formes de paysage reconnus et universellement acceptés, le déterminant essentiel du paysage urbain contemporain. Vivement le retour de la nature dans les villes africaines. Vivement les villes vertes d’Afrique.

(*) Beaugrain Doumongue est ingénieur du bâtiment. Il se définit davantage comme un « socioingénieur » du fait de son engagement au profit du développement des bâtiments et villes durables en Afrique.

Challenges Radio

Read Previous

Le groupe marocain Attijariwafa Bank signe au Tchad sa 26è implantation mondiale

Read Next

African Guarantee Fund en alliance avec Ecobank Bénin pour le financement des PME

Leave a Reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.