le taux d’intérêt de l’emprunt français à 10 ans a dépassé les 1%

Le taux d’intérêt des emprunts de l’État français à 10 ans a dépassé la barre des 1% pour la première fois depuis février 2018. Il était retombé à 0,40% début mars, un niveau bas qui était néanmoins « artificiel », selon un cabinet de gestion, qui constate une « normalisation du marché des taux ». Ce phénomène intervient en tout cas dans un contexte de durcissement des politiques monétaires, notamment américaine, la Banque centrale américaine se préparant à une ou plusieurs hausses de ses taux directeurs en 2022.

Ce n’était pas arrivé depuis 2018 : le taux d’intérêt des emprunts de l’État français à 10 ans, qui fait référence, a dépassé ce jeudi 24 mars la barre des 1%. Vers 13h15, il s’établissait en effet à 0,976% après avoir atteint 1,003% quelques minutes plus tôt. Ces dernières années, il n’a dépassé ce seuil, en clôture, qu’à deux reprises, en février 2018.

Le mouvement n’est cependant pas restreint à la France mais global : le taux sur l’emprunt à 10 ans américain était au plus haut depuis mai 2019 à 2,368% et celui du Bund allemand à 0,525%, au plus haut depuis fin 2018.

Une croissance fulgurante en l’espace d’un mois

En un mois, la hausse est fulgurante : le taux français était retombé à 0,40% début mars, au début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, qui avait provoqué une ruée des investisseurs vers les obligations, actifs considérés comme moins risqués. Sur le marché de la dette, les taux d’intérêt évoluent en sens inverse du prix des obligations.

Mais les tendances à l’œuvre sur les marchés depuis plusieurs mois ont vite repris le dessus et les taux d’intérêt se sont de nouveau envolés, pour revenir à 0,8% mi-mars, comme avant l’offensive russe.

Yohan Salleron, gérant actions de Mandarine Gestion, constate « une normalisation du marché des taux » qui « étaient bas de manière artificielle » sous l’effet des politiques ultra-accommodantes des Banques centrales. Entre mi-2019 et avril 2021, le taux d’intérêt français a même été majoritairement négatif.

Cependant le fait que cette normalisation se fasse « dans des conditions de craintes sur la soutenabilité de la croissance » est « anormal », selon l’analyste de Mandarine Gestion, qui note que la remontée des taux est en retard par rapport au pic de croissance, déjà passé.

Une hausse dans un contexte de durcissement des politiques monétaires

Depuis lundi, les taux ont repris leur ascension dans un contexte de détermination affichée par le président de la Réserve Fédérale américaine Jerome Powell à relever les taux directeurs rapidement pour contrer l’inflation, au plus haut depuis 40 ans aux États-Unis.

« Il y a beaucoup d’essence dans le moteur de l’inflation, il faut retrouver un contrôle de la hausse des prix quitte à avoir un impact récessif », poursuit Yohan Salleron.

Plusieurs banques centrales ont annoncé la semaine dernière remonter leur taux. Avec la guerre en Ukraine qui fait flamber les prix et aggrave l’inflation, elles se retrouvent en effet face à un dilemme : choisir entre garder des politiques monétaires ultra-accommodantes, au risque de voir l’inflation s’installer durablement, ou remonter leurs taux, ce qui pèse sur la capacité d’emprunts et sur les crédits des particuliers comme des entreprises, et au final sur la croissance et l’emploi.

Relever les taux directeurs pousse en effet les banques commerciales à proposer des taux d’intérêt plus élevés pour les crédits accordés à leurs clients, pour l’achat d’une maison, d’une voiture, ou encore d’une télévision, par exemple. Cela doit donc faire ralentir la consommation, pour alléger la pression sur les prix. D’autant que les problèmes d’approvisionnement ne devraient pas être résolus de sitôt. Au risque toutefois de peser sur la croissance économique.

La Banque centrale européenne (BCE) a déclaré ce jeudi 24 mars qu’elle pourrait relever ses taux d’intérêt cette année, même si ses orientations lui laissent une grande marge de manœuvre sur le calendrier d’une telle mesure, a précisé Frank Elderson, membre du conseil d’administration de la BCE. L’institution a annoncé qu’un relèvement des taux n’interviendrait que « quelque temps » après la fin des achats d’obligations, prévue au troisième trimestre, ce qui, d’après Frank Elderson, pourrait impliquer un intervalle de plusieurs mois entre les deux mesures.

De son côté, la Banque centrale américaine a opté, la semaine dernière déjà, pour une hausse prudente d’un quart de point de pourcentage, situant désormais ses taux dans une fourchette de 0,25% à 0,50%, après les avoir maintenus pendant deux ans entre 0% et 0,25%. Un consensus semble d’ailleurs émerger chez plusieurs dirigeants de l’institution monétaire pour une ou plusieurs fortes hausses des taux directeurs en 2022.

Quant à la Banque d’Angleterre, elle a aussi déjà relevé la semaine dernière sont taux d’intérêt de 0,25 point de pourcentage à 0,75% (son niveau pré-pandémie). Idem Autre exemple : la Banque du Canada a relevé début mars son taux directeur de 0,25 à 0,50%, pour la première fois depuis octobre 2018.

 

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