Ursula von der Leyen va proposer l’objectif d’une indépendance de l’UE envers les énergies fossiles russes d’ici à 2027. Une déclaration qui intervient alors que les chefs d’État et de gouvernement de l’Union sont réunis à Versailles pour élaborer les réponses économiques et militaires au choc de l’invasion russe. Les dirigeants souhaitent tendre vers une Europe indépendante de la Russie d’un point de vue énergétique et plus souveraine sur le plan militaire. Ils ont, en parallèle de ces échanges, exclu une procédure rapide d’adhésion de l’Ukraine dans le bloc des 27.
L’offensive russe en Ukraine, qui aggrave l’explosion historique des prix de l’énergie, va-t-elle accélérer la transition énergétique de l’Europe et accroître son indépendance énergétique vis-à-vis de la Russie ? C’est en tout cas le souhait des dirigeants européens. Réunis à Versailles depuis hier et jusqu’à ce vendredi 11 mars encore pour élaborer les réponses économiques et militaires au choc de l’invasion russe, ils ont réitérer leur souhait de tendre vers un bloc des Vingt-Sept plus indépendant d’un point de vue énergétique.
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a indiqué sur Twitter qu’elle proposerait l’objectif d’une indépendance de l’UE envers les énergies fossiles russes d’ici à 2027.
Des propos qui viennent appuyer un rapport de la Commission européenne publié le 8 mars dernier, assurant que « la suppression progressive de la dépendance vis-à-vis des combustibles fossiles de la Russie peut être réalisée bien avant 2030 ». L’instance propose pour cela un plan qu’elle a baptisé « REPowerEU », qui se fonde sur deux piliers. Le premier consiste à augmenter les importations de gaz naturel liquéfié (GNL) et de gazoducs en provenance de fournisseurs non russes ainsi que les volumes de production et d’importation de biométhane et d’hydrogène renouvelable.
« Nous devons devenir indépendants du pétrole, du charbon et du gaz russes. Nous ne pouvons tout simplement pas compter sur un fournisseur qui nous menace explicitement », indique Ursula von der Leyen dans ce rapport. « Grâce aux mesures du plan REPowerEU, nous pourrions progressivement supprimer au moins 155 milliards de mètres cubes de gaz fossile utilisés, ce qui équivaut au volume importé de Russie en 2021 », peut-on lire dans le document.
Pour rappel, L’UE importe 90% de sa consommation de gaz, la Russie fournissant environ 45% de ces importations, à des niveaux variables selon les États membres. La Russie représente également environ 25% des importations de pétrole et 45% des importations de charbon.
Deuxième axe : réduire plus rapidement l’utilisation des combustibles fossiles dans les maisons, les bâtiments, l’industrie et le système électrique. La Commission estime pour cela qu’il faut augmenter les énergies renouvelables et l’électrification et s’attaquer aux goulots d’étranglement des infrastructures.
Agir maintenant pour soutenir le pouvoir d’achat des familles
De nouvelles mesures urgentes destinées à amortir l’impact de la hausse des prix de l’énergie pour les consommateurs ont été évoquées lors du sommet de Versailles. Le litre d’essence, qui dépasse les 2 euros, fait craindre des révoltes sociales de type « gilets jaunes ».
« Nous devons soutenir le pouvoir d’achat des familles avec la même rapidité que nous avons répondu à l’action de la Russie », a déclaré le chef du gouvernement italien, Mario Draghi.
Dans son rapport, la Commission européenne indiquait qu’elle « examinera toutes les options possibles de mesures d’urgence pour limiter l’effet de contagion des prix du gaz sur les prix de l’électricité, telles que des limites de prix temporaires ». Elle « évaluera également les options d’optimisation de la conception du marché de l’électricité ».
La seconde journée du sommet ce vendredi 11 mars sera consacrée aux discussions sur le renforcement du modèle économique de l’UE, avant une conférence de presse finale dans l’après-midi.
La nécessité d’une Europe plus souveraine aussi sur le plan militaire
Pour Emmanuel Macron, qui assure depuis janvier la présidence tournante du Conseil de l’UE, la crise actuelle est la confirmation de la nécessité d’une Europe plus souveraine. Cette guerre va conduire les 27 à prendre « des décisions historiques » pour « complètement redéfinir l’architecture de notre Europe », a-t-il affirmé. En plus du secteur énergétique, il a aussi appelé à « des décisions en matière de défense » avec « vraisemblablement un Conseil exceptionnel » sur ce dossier en mai.
La guerre déclenchée par Vladimir Poutine a souligné le manque de capacités militaires européennes, les 27 États membres ayant très largement réduit leurs budgets depuis la fin de la Guerre froide. Pour autant, pas question d’agiter le chiffon rouge d’une armée européenne. « Ce dont on a besoin, c’est de 27 armées nationales fortes en Europe. C’est ça l’essentiel », expliquait-on à l’Élysée en amont du sommet.
Selon un projet de conclusions, les Vingt-Sept, qui réaffirment le rôle clé de l’Otan, vont souligner leur volonté d’investir « plus et mieux dans les capacités militaires », alors qu’une stratégie de défense doit être publiée avant la fin du mois.
Parmi les sujets évoqués lors du sommet de Versailles, l’adhésion de l’Ukraine à l’Europe des Vingt-Sept. « Il n’existe pas de procédure rapide », a rappelé le Premier ministre néerlandais Mark Rutte, alors que Kiev a déposé une candidature dans l’espoir de la rejoindre « sans délai ». « Est-ce qu’on peut aujourd’hui ouvrir une procédure d’adhésion avec un pays en guerre ? Je ne le crois pas. Est-ce qu’on doit fermer la porte et dire jamais ? Ce serait injuste », a résumé Emmanuel Macron.
Dans une déclaration écrite, les dirigeants ont précisé : « Sans tarder, nous renforcerons encore nos liens et approfondirons notre partenariat afin de soutenir l’Ukraine dans la poursuite de son parcours européen. L’Ukraine fait partie de notre famille européenne ».
Le Premier ministre slovène, Janez Jansa, n’a pas caché les divisions entre ceux « qui pensent que (…) les Ukrainiens se battent pour leur vie et méritent un message politique fort (…) et ceux qui débattent encore des procédures ». Des pays d’Europe centrale, Pologne en tête, souhaitent en effet accélérer la reconnaissance de la candidature ukrainienne.
Avec AFP