Oulimata Sarr, itinéraire d’une femme leader au Sénégal

Sa nomination a résonné au-delà des frontières de son pays. Première femme ministre de l’Economie, du Plan et de la Coopération au Sénégal, Oulimata Sarr est à la base une spécialiste des chiffres qui a brillé au sein d’organisations internationales. Elle prend ainsi les rênes d’un département stratégique dans un contexte de défis multidimensionnels, mais… reste confiante!

Depuis ce lundi matin à Dakar, Oulimata Sarr, 51 ans, occupe officiellement le fauteuil du chef au ministère de l’Economie, du Plan et de la Coopération du Sénégal, après la cérémonie de passation de service qui s’est tenue ce vendredi 23 septembre aux côtés de son prédécesseur, Amadou Hott. Nommée par le président Macky Sall dans le nouveau gouvernement mené par Amadou Ba, cette financière formée aux écoles canadienne et britannique, devient ainsi la première femme de l’histoire du pays à occuper cette fonction stratégique.

Connue pour son engagement en faveur de la cause féminine ces dernières années, elle était encore, il y a une dizaine de jours, directrice régionale Afrique de l’Ouest et Centrale d’ONU Femmes, couvrant 24 pays. Son entrée au gouvernement sénégalais s’illustre ainsi en cas pratique des différents plaidoyers dont elle a été porteuse, exhortant régulièrement les gouvernements de la région à améliorer la représentativité des femmes en leur sein. « Il faut laisser émerger le leadership féminin dans le monde politique », déclare-t-elle dans une interview accordée à Afrique Femme lors de sa visite en Côte d’Ivoire en mai dernier, où elle appelait les autorités à travailler davantage à la formation de gouvernements paritaires.

A l’école du leadership féminin depuis plus de 25 ans

Au fond, l’itinéraire professionnel d’Oulimata Sarr est certes empreint d’un sens marqué du leadership, mais ne présageait pas forcément des fonctions gouvernementales. D’ailleurs, « mon parcours n’a pas été une ligne droite », reconnaît-elle. Après ses études de finance à HEC Montréal, la jeune diplômée sénégalaise rentre à Dakar, sa ville natale, où elle rejoint la filiale locale du Big Four d’audit financier et de conseil Ernst & Young (EY). Dès ces années, ce leader en devenir était déjà confronté aux défis liés au genre en milieu professionnel. « Je me souviens quand j’étais plus jeune, auditeur dans un cabinet très connu, je suis chef de mission, j’ai 25 ans et j’arrive dans une salle et tout le monde est convaincu que je ne peux pas être la cheffe. Les personnes s’adressent à mes collaborateurs qui, très gênés me regardent », raconte-t-elle sur BBC

A l’automne 1996, Oulimata Sarr saisit une opportunité à Johannesburg en Afrique du Sud, chez la compagnie aérienne Interair où elle officie pendant près de neuf ans en qualité de directrice financière. Toujours dans la capitale sud-africaine, elle rejoint ensuite la Société financière internationale (IFC), la filiale du groupe de la Banque mondiale dédiée au secteur privé. Pendant dix ans, la financière sénégalaise y gravira les échelons, obtiendra un master en administration des affaires de l’Université du Bedforshire et découvrira au gré des projets qui lui sont confiés sa passion pour l’autonomisation des femmes. Elle travaillera également au bureau de Bujumbura, au Burundi, puis à Nairobi, au Kenya.

Les chiffres comme « fil conducteur »

Quelques mois après son arrivée dans la capitale kényane, Oulimata Sarr reçoit un email du directeur des ressources humaines d’ONU Femmes l’encourageant à postuler au poste régional pour lequel l’instance onusienne recherche une directrice. Son profil est retenu. L’aventure commence et la mène dans 24 pays d’Afrique francophone où elle décore parfois des présidents de la République pour leur vision du leadership féminin tel qu’Ali Bongo Ondimba du Gabon tout récemment.

Mais pour elle, les chiffres ont été omniprésents dans sa carrière longue aujourd’hui de près de 30 ans. « Mon fil conducteur a toujours été la finance », confie-t-elle, soulignant que ses premières missions chez ONU Femmes étaient plus d’ordre économique et financière qu’autre chose, en lien avec l’autonomisation des femmes par l’entrepreneuriat, les questions protection sociales, de chaînes de valeur…

Forte de toutes expériences, Oulimata Sarr a également bâti son influence sur le continent et à l’international, avec un réseau qui va des femmes et hommes de premier plan du monde du développement et des affaires aux chefs d’Etats et la diplomatie. Celle qui cite sa mère comme principale source d’inspiration, prend les commandes du ministère de l’Economie, du Plan et de la Coopération du Sénégal à un moment critique où le pays tente de construire une relance économique robuste après la Covid-19 et doit dealer avec les effets collatéraux de la guerre en Ukraine qui chamboule les chaînes d’approvisionnement, le tout dans un contexte climatique et inflationniste tendu.

Déterminée à relever les défis

Alors que le nouveau gouvernement sénégalais est à durée déterminée, les prochaines élections présidentielles étant prévues en février 2024, la question émerge quant à la disposition de temps nécessaire pour faire ses preuves. Pour sa part, elle entend bien composer avec la « belle équipe » de son département. « Je compte aussi travailler main dans la main avec mon collègue Moustapha Ba, Ministre des Finances et du Budget », prévoit Oulimata Sarr, soulignant -lors de la cérémonie de passation de service- sa détermination à mener à bien sa mission.

En tout cas, son parcours inspire plutôt la confiance. « Je suis sûr qu’elle relèvera avec brio ce défi, du fait de son expertise, son expérience et de ses qualités personnelles. Elle a relevé plusieurs défis dans sa riche carrière », a déclaré Amadou Hott en passant le bâton de commandement à la nouvelle ministre.

Challenges Radio

Read Previous

Ciment : Aliko Dangote réactive son projet d’usine au Kenya

Read Next

Nigeria: les subventions sur les carburants ont dépassé le milliard de dollars

Leave a Reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.