Cela fait maintenant un an que l’inflation, qui réduit le pouvoir d’achat des ménages, est supérieure aux 2% cibles de la banque centrale américaine (Fed). Mais ce mois de mars, le 6e d’affilée à enregistrer une hausse des prix supérieure à 6%, est le premier à intégrer entièrement l’effet de la guerre en Ukraine. La Fed anticipe un pic autour de 9% en mai, espérant ne pas passer à une inflation à deux chiffres d’ici à l’été.
L’inflation s’est encore accélérée en mars aux États-Unis atteignant 8,5% sur un an en mars, son plus haut niveau depuis 1981, contre 7,9% en février (déjà un record depuis 1982) selon l’indice des prix à la consommation (CPI) publié mardi par le département du Travail. Et l’administration Biden a annoncé des mesures pour en contrer les effets notamment sur le pouvoir d’achat des Américains.
Deux grandes raisons à cet enchaînement de records: les prix de l’essence qui ont bondi depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine, mais les prix du logement et de l’alimentation participent également à cette hausse, a précisé le département du Travail.
À noter, le mois de mars est le premier à intégrer entièrement l’effet de la guerre en Ukraine, qui avait débuté dans les tous derniers jours du mois de février.
La guerre entre l’Ukraine et la Russie déclenchée par Moscou le 24 février a conduit les Etats-Unis à interdire toute importation de pétrole, de gaz naturel liquéfié et de charbon russes. Et elle favorise l’envolée des prix de nombreuses matières premières, notamment agricoles, la Russie et l’Ukraine étant deux des principaux exportateurs de blé et d’huile de tournesol, entre autres.
Dans le détail, sur un mois, l’indice des prix à la consommation (CPI) américain affiche une hausse de 1,2%, contre 0,8% en février. La moitié de l’inflation est due aux seuls prix de l’essence, qui ont flambé de 18,3% par rapport au mois dernier, un facteur qui vient s’ajouter aux pénuries de biens et de main-d’œuvre.
Le prix du gallon d’essence à la pompe a atteint en mars son plus haut niveau historique selon la fédération d’automobilistes AAA. Et si les carburants sont restés le principal moteur de la hausse du CPI, les produits alimentaires et les loyers ont eux aussi représenté des contributions importantes à la progression de l’indice des prix.
Ce n’est pas fini mais la Fed espère éviter une inflation à deux chiffres
Si l’on considère l’inflation sous-jacente (également appelé indice « core CPI ») -en excluant les prix de l’énergie et des produits alimentaires pour obtenir une image plus juste de l’évolution des prix sur un plus long terme-, on voit qu’elle ralentit par rapport à février, à 0,3% contre 0,5%.
Et parce que ces chiffres mensuels des prix à la consommation aux Etats-Unis sont conformes aux attentes et montrent que l’inflation hors énergie et produits alimentaires ralentit, la Bourse de New York a ouvert en hausse ce mardi.
Ce point jugé rassurant favorise le recul des rendements des bons du Trésor, dont la hausse était jusqu’alors soutenue par les anticipations de remontée rapide des taux de la Réserve fédérale. Le rendement des obligations à dix ans qui avait atteint plus tôt dans la journée son plus haut niveau depuis plus de trois ans à 2,836%, revient ainsi à 2,7289%.
Cette amorce de détente sur le marché obligataire favorise en premier lieu les valeurs technologiques, sensibles à l’évolution des taux d’intérêt: leur indice S&P progresse de 1,07% et parmi les poids lourds du secteur, Apple s’adjuge 1,08%, Microsoft 1,08% et Netflix 2,09%.
Quelques minutes après le début des échanges, l’indice Dow Jones gagnait 252,39 points, soit 0,74%, à 34.560,47, le Standard & Poor’s 500 progressait de 0,87% à 4.450,70 et bien entendu, le Nasdaq Composite, l’indice des valeurs technologiques était également de la partie, prenant 1,2% à 13.573,35.
Pourtant, si l’on considère cet indice Core CPI sur un an, l’image est bien différente: là, on voit l’inflation accélérer et atteindre tout de même 6,5%, son plus haut niveau depuis août 1982.
À noter, les prix des voitures d’occasion, qui tirent l’inflation depuis des mois, ont reculé en mars (-3,8%). Cette modération des prix des voitures et véhicules utilitaires d’occasion a freiné la hausse de l’inflation dite de base.
Pour autant, l’inflation va encore augmenter souligne la Fed qui anticipe un pic en mai, autour de 9%, puis un lent recul, pour « terminer l’année toujours au-dessus de 5% », mais en évitant le spectre d’une inflation à deux chiffres.
Depuis deux ans, l’inflation dépasse les 2%, valeur cible de la Fed
La Maison Blanche avait pris les devants lundi, avertissant que l’inflation serait « extraordinairement élevée ».
Et ce mardi, elle a annoncé une série d’initiatives visant à augmenter l’utilisation et la production de biocarburant, dans l’espoir de faire baisser les prix à la pompe.
Car après avoir déjà annoncé des prélèvements historiques dans les réserves stratégiques de pétrole des Etats-Unis, le président Joe Biden se retrouve à court de levier pour enrayer ce que la Maison Blanche appelle invariablement « l’effet Poutine » sur l’inflation, dans une tentative jusqu’ici peu fructueuse d’atténuer le coût politique pour le démocrate.
Ainsi le E15, carburant qui incorpore 15% d’éthanol, pourra-t-il être vendu cet été, alors que sa distribution est normalement interdite pendant cette saison. La Maison Blanche va aussi libérer des fonds pour les infrastructures de production de biocarburant et pour encourager le développement de biocarburant pour l’aviation.
Joe Biden espère faire d’une pierre plusieurs coups: faire baisser les prix à la pompe, donner des gages sur l’environnement ainsi que sur l’indépendance énergétique, et marquer quelques points auprès d’une Amérique rurale qui généralement ne le porte pas dans son coeur.
La Fed a commencé à relever ses taux pour ralentir la surchauffe
Cela fait maintenant un an que l’inflation, qui réduit le pouvoir d’achat des ménages, est supérieure aux 2% cibles de la banque centrale américaine (Fed). Le mois de mars est même le 6e d’affilée à enregistrer une hausse des prix supérieure à 6%.
L’institution a commencé mi-mars à relever ses taux directeurs, pour accroître le coût du crédit et ainsi ralentir la consommation et l’investissement. Elle a aussi averti qu’elle allait continuer à resserrer sa politique monétaire dans les mois à venir.
Les taux, qui se trouvaient dans une fourchette de 0 à 0,25%, sont désormais compris entre 0,25 et 0,50%.
Mais parce que c’est le sixième mois consécutif d’inflation supérieure à 6% aux Etats-Unis, la Réserve fédérale pourrait accélérer le relèvement de ses taux d’intérêt le mois prochain: les marchés anticipent déjà une hausse d’un demi-point du taux des fonds fédéraux (« fed funds ») le 4 mai, après celle d’un quart de point décidée en mars, la première depuis plus de trois ans.
___
NOTE sur les indices pris en compte
L’indice CPI est celui sur lequel sont indexées, notamment, les retraites. Mais la Fed privilégie un autre indicateur, l’indice PCE, qui montre que l’inflation s’est élevée à 6,4% sur un an en février.
(avec AFP et Reuters)