Je m’engage pour l’Afrique (JMA) : de la « résilience » à la « performance »

Né en janvier 2021 à l’initiative d’Ileana Santos et d’Amina Zakhnouf, « Je m’engage pour l’Afrique » (JMA), l’incubateur de politiques publiques (IPP), est le nouvel instrument français d’une jeunesse afro-optimiste qui entend bien participer à la « refondation » de la relation euro-africaine, appelée de ses vœux par le président Emmanuel Macron. Entretien avec Ileana Santos, co-fondatrice de JMA.

Comment est né « Je m’engage pour l’Afrique » ?

Ileana Santos : L’idée est venue de deux constats : les nouvelles générations sont particulièrement actives, concernées et créatrices de valeur, mais elles ne sont pas assez conviées aux tables de réflexion du débat public entre l’Afrique et l’Europe. A cela, s’est ajoutée une réalité : les rouages et complexités de la politique publique ne sont pas maîtrisés par tous. Avec Amina Zakhnouf, la co-fondatrice de JMA, nous avons démarré cette aventure avec l’ambition de donner à chaque citoyen intéressé par les relations euro-africaines et par le développement de l’Afrique, un espace qui donne du sens et de l’utilité à son parcours, tout en mettant ses compétences et ses convictions au service de l’intérêt général.

Concrètement, quel est le mandat de JMA et comment s’organise son action ?

JMA entend faire de la politique publique, l’affaire de tous et qui invite chaque jeune à dialoguer avec toutes les strates de l’action publique et privée. Nos actions reposent sur un triptyque comprenant formation, idées et talents.  A travers notre « Ecole de la délibération », nous formons des jeunes Africains et Européens âgés de 18 à 40 ans, aux enjeux de développement africain (transition écologique, santé…) et à la citoyenneté active permettant de construire un socle de convictions, de savoir réagir face à la contradiction ou de s’approprier les méthodes délibératives, par exemple. Nous avons récemment formé les ambassadeurs de l’ONG One à la politique publique et à l’aide publique au développement.

Pour nourrir notre école de formation, notre programme « Incube Demain! » permet de faire émerger des solutions portées par les jeunesses africaine et française et de révéler de nouveaux talents. Nous lancerons bientôt la prochaine cohorte « Q1 2023 », qui sera centrée sur l’attractivité des villes et des territoires ! Je lance un appel aux entreprises et aux collectivités territoriales de France et d’Afrique francophone à nous rejoindre pour réinventer nos villes !

De quelle façon s’articule la relation entre JMA et les pouvoirs publics ?

Notre méthode est simple : agir pour créer un rapport de force et faire entendre nos propositions. Notre ouvrage « Alternatives », présente des idées concrètes pour ne plus construire une « Afrique résiliente », mais une « Afrique performante » qui n’attende pas qu’on vienne la secourir et qui s’en donne les moyens (…) En amont du sommet Union européenne-Union africaine (UE-UA) de février 2022, Emmanuel Macron avait appelé à construire un « New deal » économique et financier avec l’Afrique. Il faut reconnaître que l’impulsion du changement de logiciel est venue des pouvoirs publics européens. Pour nous, c’est absurde. L’Afrique doit avant tout passer ce « New Deal » avec elle-même. Penser le développement des nations africaines c’est articuler une pensée autour de 3 axes structurants des économies et des sociétés africaines : la compétitivité, la cohésion sociale et l’innovation. Cet ouvrage est le fruit d’un dialogue entre les membres du think thank « A New round-table on african debt » tels que Nicolas Jean (Associé chez Gide), Roselyne Chambrier (DG Arise Ivoire), Romulad Wadagni (ministre de l’Economie du Bénin) ou encore Sandra Ablamba Johnson (SG de la présidence du Togo).

De quels moyens techniques, humains et financiers dispose cette association ?

e m’engage pour l’Afrique (JMA) est une association de loi 1901 qui fonctionne avec des dons pour le moment. JMA est une communauté de 7 000 personnes à travers le monde, qui recouvre plus de 50 expertises dans différents domaines (transition écologique et environnementale, financement des économies, industrie spatiale, économie numérique…), 150 contributeurs et 18 membres actifs avec deux salariés permanents basés au siège de Paris. Avec notre business model hybride, notre challenge est de convaincre les entreprises que la participation citoyenne et la formation des jeunes doivent constituer une priorité de leurs démarches RSE (responsabilité sociétale des entreprises, ndlr).

Après le conseil présidentiel pour l’Afrique (CPA), le nouveau forum Afrique-France de Montpellier et « la Maison des mondes africains et des diasporas » : pourquoi créer une nouvelle initiative orientée vers la jeunesse africaine en France ?

Le discours de Ouagadougou a tracé les grandes lignes d’une relation renouvelée entre l’Afrique et la France. Soyons focalisés sur les résultats, JMA prend sa part de responsabilité et d’actions à travers ses idées et l’identification de nouveaux talents (…) Nous avons fait le choix de sortir d’une vision purement parisienne, car nous estimons que l’ancrage doit être dans les territoires français et africains. Au Cameroun par exemple, nous travaillons avec des acteurs qui font un excellent travail de terrain comme The Okwellians et Boukarou 237. Dans l’Hexagone, nous développons des liens avec des villes comme Poitiers ou Marseille. Cette démarche nous semble fondamentale.

Ce prisme de la jeunesse incarnée par la politique africaine de la France n’est-elle pas quelque peu décorrélée du contexte africain, car l’Afrique est certes jeune, mais le droit d’aînesse est encore la règle ?

En réalité, les signaux du terrain disent toute autre chose. Notre investissement et notre ancrage local nous informent d’une vraie volonté d’inclusion des jeunes et de la pertinence de notre démarche. Par ailleurs, si notre focalisation en termes de cible est la jeunesse : être jeune n’est ni une fin en soi, ni une caractérisation exclusive. Nous sommes jeunes, certes, mais surtout légitimes, compétents et totalement à même de penser à l’avenir du continent. Après tout, nous sommes les premiers concernés. Ceux qui feront l’avenir de ce continent et qui le construisent aujourd’hui en ont bien conscience.
 
Quels sont les prochains rendez-vous de JMA ?

Le prochain rendez-vous se tiendra à la rentrée autour d’un cycle de formation sur les enjeux de développement en Méditerranée en partenariat avec la Fondation Europe-Afrique. En fin d’année, nous ouvrirons un cycle de réflexion sur l’industrie spatiale en Afrique.

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